Mais que faisait-elle couchée ainsi au beau milieu des primes ? Quelles primes ? Où ? mais où ? Vite ! se mettre à l’abri !
Elle se redressa brusquement et ne put retenir un cri de douleur. Son corps n’était que plaie comme si elle avait lutté des heures dans une kitinière…
Un souvenir douloureux et pressant lui vint à l’esprit : « Radamanthe ! mon amour ! mon âme ! ma sève ! où es-tu ? »
Elle se redressa, ignorant cette fois la douleur.
L’horreur lui broya le cœur tandis qu’elle découvrait le pitoyable spectacle qui l’entourait.
Les plantes avaient été comme séchées sur place, seuls quelques rameaux épars émettaient péniblement une lueur jaunâtre et mourante. Les cadavres d’animaux jonchaient le sol, le silence était total, angoissant.
Elle se leva, prenant appuis sur sa pioche, surprise d’y voir sa main crispée sur le manche, comme si ni l’une ni l’autre ne lui appartenait.
Elle fit quelques pas, chancelante.
L’horreur s’insinuait au plus profond de son cerveau, de son cœur, de son corps. Elle était seule en vie. Elle hurla, hurla, hurla… jusqu’à ce qu’elle prit conscience que son cri n’arrivait même pas à franchir ses lèvres. Etait-elle morte aussi ?
Elle partit d’un rire hystérique, se prenant à regretter les grincements caquetants et sinistres des mandibules de kinchers, ceux qu’on entend, jusque quand ils sont sur vous, sournois, au détour d’une source juteuse….
Elle retomba, épuisée, des larmes énormes, douloureuses, gonflant ses yeux meurtris, inondant son masque maculé de débris, des larmes salvatrices qui, enfin, libéraient le voile obscurcissant son esprit… Elle se souvint :
...
C’était une de ces journées souriantes et dorées, pleines de plaisir et de joie de vivre. Plusieurs groupes d’homins foraient, disséminés dans les terres abandonnées. Les plaisanteries fusaient, les chansons virevoltaient dans l’air. La suprême avait montré son nez et avait été forée, tous et toutes étaient détendus et jouissaient tranquillement de la douceur de vivre, s’unissant en riant pour chasser les kitins trop envahissants, kamis et karas confondus, comme il se doit chez les vrais foreurs .
Par moment, une douce torpeur gagnait les homins, souriant de la dernière plaisanterie, gagnés par la monotonie des coups de pioche.
C’est dans un de ces moments où le temps semblait suspendu que cela arriva.
Elle observait, rêveuse, le mouvement gracieux des muscle fins de son amour concentré sur sa tache, souriant de son bonheur quand l’inexplicable survint :
Peut-on imaginer le non bruit, le non mouvement, la négation de tout ce qu’on connait ?
C’est pourtant ce qui s’abattit sur ce charmant groupe d’homins, et sur toute la planète Atys sans qu’ils s’en rendissent compte.
Tel un énorme coup de gomme, rageusement appuyé par un géant malveillant, tout se figea et disparut dans le néant… plouf…rideau….
Pas de douleur, pas de blessure, juste un énorme …. Rien.
Rien…
...
Elle essuya son visage et se surprit à sourire à travers ses larmes. Elle tâta ses membres endoloris et constata avec ravissement que les proportions avantageuses de son … de l’arrière d’elle-même en quelque sorte, n’avaient rien perdu de leurs caractéristiques…
Elle vivait, et son cœur lui disait que son amour, son beau Matis était toujours vivant.
Elle tendit l’oreille, et il lui sembla entendre des cris, très loin, mais elle ne put dire si c’était un rêve ou la réalité.
Elle déclara : « nous allons nettoyer tout ça et repartir à nouveau »
Elle sourit et sombra, épuisée, dans un profond sommeil réparateur.
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