Le soleil était à son zénith.
A travers les grands déserts annexés par l’Empire Fyros de Dexton, les dunes muaient imperceptiblement leur vertigineuse hauteur au rythme des vents chauds.
Regroupés au sommet de l’une d’entre-elles, dans leur campement de tentes dressées la veille, la troupe des foreurs Fyros attendaient dans une sorte d’impatience bon enfant le signal du départ. Les plus jeunes échangeaient plaisanteries et taquineries sur le dos des anciens qui leur retournaient des grondements félins faussement menaçants.
Dregan Bulx, une des proies favorite de la meute, se contentait d’un regard noir rehaussé d’un rictus vorace révélant son unique grosse canine, prêt à « dévorer » l’impudent qui s’aventurerait un peu trop près de lui…
… Ce qui faisait hurler de rires la bande « d’ados gingos » qui le harcelait sans cesse, repoussant peu à peu la frontière entre leur hardiesse couarde et l’imprévisibilité d’une attaque imparable de la part du vieux fyros…
« Hey pépé ! T’as les pieds enracinés ?! Ou bien tu tentes de te camoufler ?
- Attends… le camouflage il est raté, même les bolobis sont plus discrets que le gros papi Dreg et ses trois cannes…
- Trois cannes ?
- Ben, le manche de sa pioche et ses deux moignons de genou aux vues de la vitesse à laquelle il s’enfonce dans l’sab…HIIIIRRKKKK !!!!!!!!! »
Le vétéran s’était arc-bouté d’un coup ! Toute sa musculature avait semblé jaillir sous les replis de ses vêtements…
Tels des mulots des sables, tous les « ados gingos fyros» s’éparpillèrent en trombe, roulant au bas de la dune, sautant par dessus des ballots de vivres du campement, s’enfouissant dans la pénombre des tentes…
Mais tous ne furent point aussi rapides…
Hécate, sifflante et grondante, tenta des ruades furieuses pour se défaire de la poigne d’acier qui retenait sa cheville prisonnière. Dyx son frère, la tête retenue par la large paume du « pépé », feulait face contre terre et goûtait à pleine bouchée l’âpreté du sable en poussière d’écorce du désert.
« Joli coup Dreg ! T’as chopé les deux fourrures blanches ! »
D’une traction, pépé Dreg assura un peu mieux sa prise sur la jambe de la féline sœur de Dyx…
- Noooonnn, pas le sable… !
Dyx fut relâché, et à son tour Hécate, la tête la première, vint partager la même pitance sablonneuse que son frère.
- Herf ! Kof ! Kof ! Pé… Pitié !!! Herrrkk ! kof… !
Hécate griffait le sol, tentant de s’extirper du supplice, mais l’addition rituelle était trois pelletés d’embruns ni plus ni moins...et inexorablement, rituel fut rendu.
Puis elle fut délivrée à son tour.
Les autres vétérans échangeaient des rires gras se complaisant du spectacle de la face barbouillée des deux enquiquineurs de première.
Le frère et la soeur frictionnaient leur fourrure et le duvet de leur visage, tout en crachant des particules agglomérées de salive et de sable d’écorce.
- Il n’y a rien de plus nourrissant les petiots !
- Hé bé ! Va en falloir des bains pour retrouver vos couleurs blanches les siamois ! Hahaha !
- Dregan a gagné son shooky ce soir !
D’autres rires vinrent relayer ceux des anciens : les jeunes se moquèrent à leur tour du mauvais sort de leurs infortunés compères, bienheureux qu'il ne fut pas le leur.
Parmis les rigolards, s’en tenait un en particulier qui eut le don d’ajouter la cerise sur le gateau.
Hécate lança un regard noir à son amoureux-soupirant Argran Texen. Celui-ci, fusillé droit au cœur, se reprit et s’accroupissant auprès d’elle, il tenta maladroitement de lui épousseter le visage.
Elle montra les crocs… il eut un mouvement de recul et tomba à la renverse.
- Toi t’es jamais là pour me défendre ! Kof…kof…
- Mais… C’est Dreg !
- Lâche !
- Ha non ! Je ne suis pas lâche !
- Lâche ma main, crétin !
Hécate se rinça la bouche avec l’outre que lui tendait Dyx.
« Pépé » Dregan, un sourire narquois aux lèvres, leur asséna deux tapes paternelles sur l’épaule.
- Quand vous voulez les jeunes… On remet ça quand vous voudrez…
Hécate redressa la tête, fière, la fourrure échevelée, ignorante de cette dernière bravade de la part de l’ancien.
Dyx eut un sourire complice à l’attention de Dregan.
- Tu nous as eus, on se vengera tu sais…
- Mais j’y compte bien les siamois, j’y compte bien…
L’atmosphère d’Atys changea subtilement.
Tout à coups, plusieurs foreurs se mirent à humer l’air.
Par endroits, de grandes nappes brunes de sable se mirent à s’étendre et à se rétracter lentement. Un phénomène quasi invisible pour celui qui était étranger aux facéties d’Atys en cette partie du continent.
Les sources de Mitexi bouillonnaient à quelques centimètres sous la surface du désert. Et cela courait le long des veines de sève que drainait la planète.
Orthien Texen, le chef du campement, donna le signal :
- C’est l’heure, nous avons tout l’après-midi devant nous. Éparpillez-vous aux points de forage, chaque groupe doit avoir rempli ce soir cinq sacs de mitexi. Une prime pour les sacs de matière pure.
Tous les foreurs ramassèrent leurs effets. Les mektoubs de bât suivirent docilement leurs maîtres au son des clapotis que ceux-ci émettaient avec leur bouche. Et chaque groupe entreprit de rejoindre son emplacement de travail.
Dyx, Hécate et Argran furent les derniers à partir. Leur emplacement de forage était à vingt minutes du campement de base.
Orthien retint son fils par la manche :
« Vous rentrez deux heures avant le crépuscule Argran. Vous êtes de corvée de chasse ce soir vous trois, alors ne lambinez pas.
Argran eut un pincement de lèvre et hocha brièvement la tête.
- Oui papa, on le sait.
Le chef des foreurs ajouta :
- Il y a des Yber pas loin de votre poste, tentez-les et surtout, surtout ne vous essayez pas comme la dernière fois sur un Timari. Promis ?
- Oui, papa…
Hécate, impatiente, machouillait les rênes de son mektoub « Bilboquet ». Elle se mit à soupirer un peu fort.
Dyx gardait sa propre bête et celle plus massive d’Argran, une créature élevée dans les jungles Zoraïs.
En attendant, les siamois lissaient mutuellement la soie blanche de leur crinière. Une habitude singulière qui les caractérisait autant que l'opalin rare de leurs atours félins. Les gestes étaient précis, nets et si parfois ils étaient sans douceur, la minutie était le métronome de leur cérémonial.
... Toutefois, la soeur jetait des oeillades pressantes au fils du chef.
Orthien eut ces derniers mots à voix basse :
- Laisse-la grogner un peu dans son coin. Ta mère avait ces mêmes humeurs inapaisables dans l’immédiat, mais comme toute féline compagne, elle revenait adoucie avec une petite requête au bout des lèvres en guise de réconciliation. Hécate est pareille…
- Papa ! C’est bon, on y va ! Je sais comment faire avec elle…
- Oui, oui… tu apprendras, comme nous tous durent apprendre à les connaître et encore après toutes ces années, ta mère est un mystère…
Argran haussa les épaules et tourna les talons. Il rejoignit Hécate et Dyx dont la toilette commune avait viré à une chamaillerie de mains qui menaçait de passer du stade de jeu à règlement de compte...
Un "t'as qu'à te brosser" de la part de Dyx lui valu un coup de pied vengeur de la part d'Hécate qui au regard fulminant de son frère alla se réfugier en grimpant tel un chat fou sur le dos d'Argran.
Ils dévalèrent la dune en cavalant et en riant les uns derrière les autres, les mektoubs se bousculant et suivant tantôt l'un des jeunes foreurs, tantôt un autre...
Orthien les suivit du regard jusqu’au bas de la pente sabloneuse. Le père vit son fils reprendre les rênes du mektoub d’Hécate qui avait gesticulé furieusement des bras une fois arrivée en bas et son fils avait promptement dodeliné de la tête alors que Dyx avait relevé ses mains en l’air dans une expression incapable du style « que veux-tu que j’y fasse ? ».
La petite troupe repartie en file indienne, Argran ouvrant la marche deux mektoubs en main, Hécate sur ses talons encadrée par les deux jeunes homins. Elle trottinait et jouait avec sa pique. Sa pioche tomba sur le sol et se fut son frère qui la ramassa derrière elle. La troupe s’arrêta quelques mètres plus loin et Argran attacha la pioche de sa dulcinée au flanc de « Bilboquet » après que celle-ci eusse encore fait forces moulinets menaçants…
Le père eut ces mots pour lui-même :
- Oui mon fils, pour sûr, tu sais comment y faire… J’admire ta maîtrise du sujet ! Hoho ! on dirait moi à ton âge…
Orthien les laissa à leur pérégrination et regarda en direction des autres colonnes de foreurs ; certains étaient déjà loin, les vétérans marchaient vite et avaient les points de forage les plus éloignés. Des groupes avaient atteint aussi les deux premiers points encore visibles du campement : ils commençaient à déballer leur attirail des mektoubs.
Orthien s’attacha à son propre départ.
Le vent soufflait de plus en plus fort mais rien ne présageait que celui-ci forcisse au point de se retrouver empêtrer dans une probable tempête.
Il se faisait la réflexion que si les rafales montaient en régime, on remettrait à demain le manque de forage de ce jour. Il ferait le tour des campements et il rappellerait les troupes avant l’heure.
Il harnacha « Vatyk » son mektoub de monte.
En tant que chef, son rôle consistait à s’assurer du bon déroulement de la vaste opération de forage en ralliant les différents sites de travail au fur et à mesure de la journée.
Il déplacerait les équipes en fonction des mouvements des sources de Mitexi.
Vatyk, renâcla et ne voulut pas se laisser passer le mors de ses rênes.
« Allons, tu vas pas avoir peur de ces bourrasques mon ami … »
L’animal recula, peu coopératif. Orthien tenta une saisie rapide de sa mâchoire mais il ne captura que le vide.
- Qu’est ce qui te rend nerveux l’ami…
Le mektoub se déplaça entre deux tentes et s’arrêta en grattant le sol puis il se releva sur ses deux pattes arrière reniflant bruyamment l’air.
Ses yeux s'équarquillèrent, Orthien venait de voir la raison de l'énervement de son mektoub.
Son cœur se mit à battre très fort.
Il étreignit la garde de sa lourde épée.
Cela avait surgi de nulle part…
… Mais le nuage de poussière soulevée par un foisonnement de pattes fonçait droit vers sa position... Et cela avançait vite, trop vite...
(à Suivre)
Le cinquième peuple.
Moderator: Chroniques d'Atys
Le cinquième peuple.
Last edited by shantag on Sun Jul 13, 2008 1:42 am, edited 1 time in total.
Re: Le cinquième peuple.
HRP
Vite vite...
Shantag, tes textes seront toujours aussi enchanteurs
même mon épouse qui ne joue pourtant pas veut les lire
HRP
Vite vite...
Shantag, tes textes seront toujours aussi enchanteurs
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HRP
Retour d'expédition, chapitre 2
Cinq…
« Jena, Ô Très Sainte… plus que cinq, ne nous abandonne pas ma Déesse, je t’en supplie… »
D’une troupe qui comptait cinquante-cinq individus, il ne restait plus que ces cinq-là.
Au retour, le labyrinthe des Primes Racines avaient été le tombeau de plusieurs d’entre eux… A l'aller, aucune perte n'avait été déplorée.
Les terres qu'ils avaient arpenté étaient maudites, elles n'avaient jamais souhaité revoir leur présence...
Les longues cavernes n’avaient eu de cesse de se succéder les unes après les autres, toutes recelant leurs dangers prêts à fondre sur ces improbables rescapés du « monde oublié… »
Là où ils progressaient, les spores éclairaient faiblement la haute corniche végétale.
Pourtant, ils courraient avec l’énergie du désespoir, et ce malgré l’étroitesse de la boursouflure de la racine suintante d’humidité empoussiérée.
À une centaine de mètres de hauteur, chaque pas glissant leur valait un rappel d’adrénaline… la seule et dernière énergie dans laquelle ils puisaient pour trouver la force de les fuir, eux, les démons des abysses qui les avaient pris en chasse dès leur incursion dans les abîmes d’Atys…
« Cielo, en bas ! », tonitrua la voix grave et puissante d’Oloon-Zeï.
Le matis fut interrompu dans ses songes de prières.
Étant en tête de file, il fit un geste sec de la main. La bande exténuée arrêta nette sa progression.
À l’arrière, le zoraï colossal ayant donné l’alerte, pointait la double lame de sa hache de guerre en direction de la vallée.
Son armure noire, ciselée de liserés écarlates, était déchiquetée sur les avant-bras et entaillée sur le flanc gauche… souvenirs récents d’une bête d’ombre, un chasseur varynx, que le Zoraï avait tué à mains nues.
En contrebas, des masses blanches, portées sur de multiples pattes, avançaient à vive allure le long d’un large fleuve de sève.
Au milieu des mastodontes cuirassés, grouillaient des octopodes de plus ou moins grande taille qui semblaient saisi d’une frénésie démente.
« Les kinchers regroupent les kibans, ils ont l’intention d’éclater la racine de voûte et d’obstruer la sortie de cette caverne ! »
- Ils cherchent à nous piéger dans la nasse.
Faux-calme mais précis, le Tryker Max Mac Mahon engagea une ogive dans son « Gueule-Dragon », un lance-grenade de sa conception.
Il ajouta en soutenant d’égal à égal le regard du Matis :
- Plus que dix munitions…, - il cracha un conglomérat de suie, de poussière, de glaires et plus inquiétant, d’un peu de sève mêlée- , … Mais je ne serai pas le poisson ! Venez me chercher sales tueurs et ramenez votre reine que je lui éclate la panse à coups d'grenades !
Le tube noirci du lance-grenade claqua violemment quand Max finit de le recharger. Ses phalanges blanchissaient de fureur en tenant la crosse de l’arme.
Cielo de Velani jeta un rapide coup d’œil aux fuyards : en plus du Tryker querelleur il y avait un zoraï, un fyros et une autre matisse.
Il avait obtenu leur assentiment pour le rôle de guide de leur bande hétéroclite. En raison de sa détention des cartes grossières des primes racines et de sa connaissance à interpréter les variations du terrain et étant aussi doté d'un sens inné de l’orientation, il avait hérité du statut de chef… Et puis, ça évitait aussi aux autres de se retrouver peut-être responsable d’une erreur qui coûterait les dernières vies du groupe.
Cielo fit un geste circulaire et intima de reprendre leur cavalcade effrénée.
Ils gagnèrent, quelques dizaines de mètres plus loin, une plateforme formée par un entrelacs de racines.
De là ils surplombaient le théâtre de la Cour des miracles du royaume des abominations cauchemardesques.
Les kitins, lancés à leurs trousses, savaient où leurs proies homines se trouvaient.
Des kinchers de très petite taille, entreprenaient l’ascension de la falaise avec toute la vélocité de leurs triples paires de pattes, griffant l’écorce et arrachant ses morceaux racornies dès que leur poids les faisait retomber une dizaine de mètres plus bas en raison de la déclivité de la paroi devenant trop prononcée.
Se redressant en secouant toute leur machinerie meurtrière, ils repartaient à l’assaut en crachant leur haine sans ménager leurs grotesques efforts !
Il y eut un frisson parmi les homins…
Tout à coups, les haillons enténébrés d’une robe thaumaturgique dansèrent leur sarabande quand le maître des flammes Thurio s’éleva dans les airs et fit jaillir le feu salvateur de Ma-Duk juste au-dessus d’eux !
La température monta de plusieurs degrés en une fraction de seconde…
Surgissant de ses mains réunies en coupe, la boule de flammes rugissante se fracassa avec fureur contre une ombre ailée tombée du ciel des Primes Racines.
Les flammèches léchèrent avec une avidité carnassière la carcasse vrombissante d’un kipesta qui chuta dans une phosphorescence incandescente ! L’insecte géant ruait dans les airs, mortellement brûlé… Un cri d’agonie aux intonations métalliques vrilla leurs tympans, et, dans un dernier sursaut, une boule vomit d’acide et de fumeroles faucha en représailles l’ensorceleur fyros !
L’aberration organique éclaboussa le pavois brandi par réflexe d’une des dernières favorites de la garde du roi Yrkanis détachée spécifiquement pour la protection du mage.
Ezétchelle Di Cendro jeta dans le vide son bouclier qui commençait à se faire dévorer par les sucs digestifs : Une minuscule feuille tourbillonnant à la suite de l’agresseur, lui-même devenu une brindille malingre carbonisée.
Le kipesta s’écrasa au sol.
Fyros et Matis échangèrent un rapide signe de reconnaissance mutuelle, un de plus…
Soudain, ils les entendirent : D’autres monstres s’élancèrent des grappes bourdonnantes juchées une cinquantaine de mètres au-dessus des homins survivants. Depuis ces nids vivants, parvenaient les sifflements de rage des kitins ayant détecté le souffle des flammes honnis en ces lieux sépulcraux.
Au signal, les couvains se distendirent et une nuée de tueurs serpentiformes plongèrent !
La soudaineté du danger galvanisa l'instinct de survie du matis.
Cielo se revit parcourir mentalement les cartes retraçant les lieux.
« … Le lac… la forêt de champignons géants est derrière nous… « parmi les jublas se dressent les tombes des premiers homins qui s’aventurèrent en ces terres inhospitalières. »… les ruines, les ruines de cette forteresse dans laquelle nous avons séjourné au départ de l’expédition… oui, je le sens, elles ne sont plus très loin… il faut qu’on y parvienne ! »
« Il faut avancer ! Les ruines de l’ancienne forteresse sont après ce… »
- Ca va cracher l'enfer ! Mange mon Gueulard ! Mange-moi ces volatiles de fils de… *KAWBOOM !!!*
Le lance-grenade entrait en action.
Cielo hurla la fin, Max beuglait comme un fou, des tisons et des scories de morceaux de chairs explosées de kipestas tombaient en une pluie macabre :
- APRES LE COL ! Le… *BOOM !!!* LE PLATEAU ROCHEUX EST… *KAWBOOM!!!* APRES LE COL …
- DESTRUCTION… *BOOM !!!*, un rire sardonique et particulièrement aigu du tryker fut noyé par une autre explosion faisant mouche !
Ayant réussi à voleter jusqu’à eux, Ezétchelle trancha la jointure d’un couple d’ailes d’un kipesta gravement blessé par une des explosions de « Gueule-Dragon » … La bestiole chût comme une lourde branche sciée et éclata tout en bas sur ses congénères kinchers.
La matisse n’entendit pas très bien les paroles de Cielo :
- QUOI ??? TU VEUX QU’ON AILLE… -*BOOM !!! GNAHAHAHAHA !!!*- QU’ON AILLE Où ?
De nouveau, le feu de Ma-Duk venait d’être invoqué et cette fois-ci ce fut le corps ratatiné d’un kincher que renvoya Thurio à ses semblables.
- Ils montent jusqu’à nous !!!
*BOOM!!!* Un autre kincher fut projeté comme une toupie dans les airs par le tir du lance-grenade.
- Y en a même pour les cafards de la reine !!!
- LE COL !!! LA FORTERESSE EST DERRIERE !!! EN AVANT !!!
*KAWBOOM!!!*
Comprenant enfin, le fyros et la matisse se saisirent du tryker déchaîné et l’entraînèrent de force à la suite de Cielo. Le petit homin gesticulait comme un beau diable, possédé par l’ivresse du carnage !
- Lâchez-moi les esclavagistes !!! Je vous pulvérise, je vous broie les…
Les vociférations toutes attentionnées du représentant des lacs sereins, furent couvertes par les crissements survoltés des kipestas se lançant à leur poursuite…
Oloon fermait la marche. Il tenait dans ses poignes d’acier le manche de sa hache à deux mains de quatre têtes plus haute que Max.
Il vit ses compagnons sauter d’une plateforme à une autre, Max se rétamant « face contre écorce ».
- Là ! dans la racine ! Un passage !
- Je vais vous tu…
Un kipesta fondit sur eux. Le zoraï plus vif qu’un serpent, cisailla en deux, à partir de l’abdomen, l’assaillant. Les deux morceaux se perdirent dans la nuit des Primes racines…
Cielo et les autres s’étaient engouffrés dans une anfractuosité, disparaissant à la vue de leur gigantesque gardien.
Oloon s’apprêta à sauter à son tour sur la plateforme…
… Il fit volte-face : quelque chose avançait sur la même corniche que lui.
Dans les zones d’ombre se tenait dissimulé une menace.
Il s’attendait à voir un kincher surgir, un de ceux qui s’évertuaient à gravir la falaise…
Un coup d’œil circulaire, il ne vit plus un seul kipesta.
Toutefois…
« Il » le vit bouger.
Pattes relevées au-dessus de sa gueule monstrueuse, dans une posture de défi…
Une attitude inattendue de la part d’un kitin.
« Il » s’avança à l’orée de la plateforme où Oloon et ses compagnons s'étaient à peine reposés.
Ses mandibules brillaient dans le clair-obscur de la caverne… toute sa carapace avait des reflets bruns et argentés. Il avait l’air plus sournois, bien plus pourvu d’excroissances mortelles que les kinchers communs…
Son instinct lui indiquait qu’il s’agissait d’un tout autre kitin… Il devait s'agir d'un kirosta, un soldat royal.
D'une bravade Oloon provoqua la créature :
- Je sais ce que tu es, montre-toi !
La créature avança complètement ramassé sur ses pattes. Elle entra délibérément dans le halo d’un rai de lumière qui crevait le plafond de la caverne des Primes Racines. En cet endroit la plateforme était baignée de lumière.
Sous le choc de la vision, le zoraï chancela.
Et tandis que le « kitin » s’approchait, ce fut sa réponse au ton mielleux qui vit le colossal homin se retenir contre la paroi…
« … et selon toi… « Que »suis-je ? »
Le zoraï et le "Kitin" se chargèrent dans un assaut mortel... et quand cela fut fini, la clémence des Kamis se pencha sur le corps à l'agonie de leur protégé.
C'est ce moment que choisi "le kitin", qui, de la pointe d'un dard perfora la graine de vie interdisant à jamais le retour à la vie d'Oloon-Zeï.
S'enveloppant des ombres des Primes Racines, se lovant dans la noirceur de sa nuit éternelle, la créature disparue. Comme les relents d'une fumerole viciée, s'échapèrent, à sa traîne, ces murmures :
"...Cinquante-et-un... Plus que quatre..."
(à suivre)
« Jena, Ô Très Sainte… plus que cinq, ne nous abandonne pas ma Déesse, je t’en supplie… »
D’une troupe qui comptait cinquante-cinq individus, il ne restait plus que ces cinq-là.
Au retour, le labyrinthe des Primes Racines avaient été le tombeau de plusieurs d’entre eux… A l'aller, aucune perte n'avait été déplorée.
Les terres qu'ils avaient arpenté étaient maudites, elles n'avaient jamais souhaité revoir leur présence...
Les longues cavernes n’avaient eu de cesse de se succéder les unes après les autres, toutes recelant leurs dangers prêts à fondre sur ces improbables rescapés du « monde oublié… »
Là où ils progressaient, les spores éclairaient faiblement la haute corniche végétale.
Pourtant, ils courraient avec l’énergie du désespoir, et ce malgré l’étroitesse de la boursouflure de la racine suintante d’humidité empoussiérée.
À une centaine de mètres de hauteur, chaque pas glissant leur valait un rappel d’adrénaline… la seule et dernière énergie dans laquelle ils puisaient pour trouver la force de les fuir, eux, les démons des abysses qui les avaient pris en chasse dès leur incursion dans les abîmes d’Atys…
« Cielo, en bas ! », tonitrua la voix grave et puissante d’Oloon-Zeï.
Le matis fut interrompu dans ses songes de prières.
Étant en tête de file, il fit un geste sec de la main. La bande exténuée arrêta nette sa progression.
À l’arrière, le zoraï colossal ayant donné l’alerte, pointait la double lame de sa hache de guerre en direction de la vallée.
Son armure noire, ciselée de liserés écarlates, était déchiquetée sur les avant-bras et entaillée sur le flanc gauche… souvenirs récents d’une bête d’ombre, un chasseur varynx, que le Zoraï avait tué à mains nues.
En contrebas, des masses blanches, portées sur de multiples pattes, avançaient à vive allure le long d’un large fleuve de sève.
Au milieu des mastodontes cuirassés, grouillaient des octopodes de plus ou moins grande taille qui semblaient saisi d’une frénésie démente.
« Les kinchers regroupent les kibans, ils ont l’intention d’éclater la racine de voûte et d’obstruer la sortie de cette caverne ! »
- Ils cherchent à nous piéger dans la nasse.
Faux-calme mais précis, le Tryker Max Mac Mahon engagea une ogive dans son « Gueule-Dragon », un lance-grenade de sa conception.
Il ajouta en soutenant d’égal à égal le regard du Matis :
- Plus que dix munitions…, - il cracha un conglomérat de suie, de poussière, de glaires et plus inquiétant, d’un peu de sève mêlée- , … Mais je ne serai pas le poisson ! Venez me chercher sales tueurs et ramenez votre reine que je lui éclate la panse à coups d'grenades !
Le tube noirci du lance-grenade claqua violemment quand Max finit de le recharger. Ses phalanges blanchissaient de fureur en tenant la crosse de l’arme.
Cielo de Velani jeta un rapide coup d’œil aux fuyards : en plus du Tryker querelleur il y avait un zoraï, un fyros et une autre matisse.
Il avait obtenu leur assentiment pour le rôle de guide de leur bande hétéroclite. En raison de sa détention des cartes grossières des primes racines et de sa connaissance à interpréter les variations du terrain et étant aussi doté d'un sens inné de l’orientation, il avait hérité du statut de chef… Et puis, ça évitait aussi aux autres de se retrouver peut-être responsable d’une erreur qui coûterait les dernières vies du groupe.
Cielo fit un geste circulaire et intima de reprendre leur cavalcade effrénée.
Ils gagnèrent, quelques dizaines de mètres plus loin, une plateforme formée par un entrelacs de racines.
De là ils surplombaient le théâtre de la Cour des miracles du royaume des abominations cauchemardesques.
Les kitins, lancés à leurs trousses, savaient où leurs proies homines se trouvaient.
Des kinchers de très petite taille, entreprenaient l’ascension de la falaise avec toute la vélocité de leurs triples paires de pattes, griffant l’écorce et arrachant ses morceaux racornies dès que leur poids les faisait retomber une dizaine de mètres plus bas en raison de la déclivité de la paroi devenant trop prononcée.
Se redressant en secouant toute leur machinerie meurtrière, ils repartaient à l’assaut en crachant leur haine sans ménager leurs grotesques efforts !
Il y eut un frisson parmi les homins…
Tout à coups, les haillons enténébrés d’une robe thaumaturgique dansèrent leur sarabande quand le maître des flammes Thurio s’éleva dans les airs et fit jaillir le feu salvateur de Ma-Duk juste au-dessus d’eux !
La température monta de plusieurs degrés en une fraction de seconde…
Surgissant de ses mains réunies en coupe, la boule de flammes rugissante se fracassa avec fureur contre une ombre ailée tombée du ciel des Primes Racines.
Les flammèches léchèrent avec une avidité carnassière la carcasse vrombissante d’un kipesta qui chuta dans une phosphorescence incandescente ! L’insecte géant ruait dans les airs, mortellement brûlé… Un cri d’agonie aux intonations métalliques vrilla leurs tympans, et, dans un dernier sursaut, une boule vomit d’acide et de fumeroles faucha en représailles l’ensorceleur fyros !
L’aberration organique éclaboussa le pavois brandi par réflexe d’une des dernières favorites de la garde du roi Yrkanis détachée spécifiquement pour la protection du mage.
Ezétchelle Di Cendro jeta dans le vide son bouclier qui commençait à se faire dévorer par les sucs digestifs : Une minuscule feuille tourbillonnant à la suite de l’agresseur, lui-même devenu une brindille malingre carbonisée.
Le kipesta s’écrasa au sol.
Fyros et Matis échangèrent un rapide signe de reconnaissance mutuelle, un de plus…
Soudain, ils les entendirent : D’autres monstres s’élancèrent des grappes bourdonnantes juchées une cinquantaine de mètres au-dessus des homins survivants. Depuis ces nids vivants, parvenaient les sifflements de rage des kitins ayant détecté le souffle des flammes honnis en ces lieux sépulcraux.
Au signal, les couvains se distendirent et une nuée de tueurs serpentiformes plongèrent !
La soudaineté du danger galvanisa l'instinct de survie du matis.
Cielo se revit parcourir mentalement les cartes retraçant les lieux.
« … Le lac… la forêt de champignons géants est derrière nous… « parmi les jublas se dressent les tombes des premiers homins qui s’aventurèrent en ces terres inhospitalières. »… les ruines, les ruines de cette forteresse dans laquelle nous avons séjourné au départ de l’expédition… oui, je le sens, elles ne sont plus très loin… il faut qu’on y parvienne ! »
« Il faut avancer ! Les ruines de l’ancienne forteresse sont après ce… »
- Ca va cracher l'enfer ! Mange mon Gueulard ! Mange-moi ces volatiles de fils de… *KAWBOOM !!!*
Le lance-grenade entrait en action.
Cielo hurla la fin, Max beuglait comme un fou, des tisons et des scories de morceaux de chairs explosées de kipestas tombaient en une pluie macabre :
- APRES LE COL ! Le… *BOOM !!!* LE PLATEAU ROCHEUX EST… *KAWBOOM!!!* APRES LE COL …
- DESTRUCTION… *BOOM !!!*, un rire sardonique et particulièrement aigu du tryker fut noyé par une autre explosion faisant mouche !
Ayant réussi à voleter jusqu’à eux, Ezétchelle trancha la jointure d’un couple d’ailes d’un kipesta gravement blessé par une des explosions de « Gueule-Dragon » … La bestiole chût comme une lourde branche sciée et éclata tout en bas sur ses congénères kinchers.
La matisse n’entendit pas très bien les paroles de Cielo :
- QUOI ??? TU VEUX QU’ON AILLE… -*BOOM !!! GNAHAHAHAHA !!!*- QU’ON AILLE Où ?
De nouveau, le feu de Ma-Duk venait d’être invoqué et cette fois-ci ce fut le corps ratatiné d’un kincher que renvoya Thurio à ses semblables.
- Ils montent jusqu’à nous !!!
*BOOM!!!* Un autre kincher fut projeté comme une toupie dans les airs par le tir du lance-grenade.
- Y en a même pour les cafards de la reine !!!
- LE COL !!! LA FORTERESSE EST DERRIERE !!! EN AVANT !!!
*KAWBOOM!!!*
Comprenant enfin, le fyros et la matisse se saisirent du tryker déchaîné et l’entraînèrent de force à la suite de Cielo. Le petit homin gesticulait comme un beau diable, possédé par l’ivresse du carnage !
- Lâchez-moi les esclavagistes !!! Je vous pulvérise, je vous broie les…
Les vociférations toutes attentionnées du représentant des lacs sereins, furent couvertes par les crissements survoltés des kipestas se lançant à leur poursuite…
Oloon fermait la marche. Il tenait dans ses poignes d’acier le manche de sa hache à deux mains de quatre têtes plus haute que Max.
Il vit ses compagnons sauter d’une plateforme à une autre, Max se rétamant « face contre écorce ».
- Là ! dans la racine ! Un passage !
- Je vais vous tu…
Un kipesta fondit sur eux. Le zoraï plus vif qu’un serpent, cisailla en deux, à partir de l’abdomen, l’assaillant. Les deux morceaux se perdirent dans la nuit des Primes racines…
Cielo et les autres s’étaient engouffrés dans une anfractuosité, disparaissant à la vue de leur gigantesque gardien.
Oloon s’apprêta à sauter à son tour sur la plateforme…
… Il fit volte-face : quelque chose avançait sur la même corniche que lui.
Dans les zones d’ombre se tenait dissimulé une menace.
Il s’attendait à voir un kincher surgir, un de ceux qui s’évertuaient à gravir la falaise…
Un coup d’œil circulaire, il ne vit plus un seul kipesta.
Toutefois…
« Il » le vit bouger.
Pattes relevées au-dessus de sa gueule monstrueuse, dans une posture de défi…
Une attitude inattendue de la part d’un kitin.
« Il » s’avança à l’orée de la plateforme où Oloon et ses compagnons s'étaient à peine reposés.
Ses mandibules brillaient dans le clair-obscur de la caverne… toute sa carapace avait des reflets bruns et argentés. Il avait l’air plus sournois, bien plus pourvu d’excroissances mortelles que les kinchers communs…
Son instinct lui indiquait qu’il s’agissait d’un tout autre kitin… Il devait s'agir d'un kirosta, un soldat royal.
D'une bravade Oloon provoqua la créature :
- Je sais ce que tu es, montre-toi !
La créature avança complètement ramassé sur ses pattes. Elle entra délibérément dans le halo d’un rai de lumière qui crevait le plafond de la caverne des Primes Racines. En cet endroit la plateforme était baignée de lumière.
Sous le choc de la vision, le zoraï chancela.
Et tandis que le « kitin » s’approchait, ce fut sa réponse au ton mielleux qui vit le colossal homin se retenir contre la paroi…
« … et selon toi… « Que »suis-je ? »
Le zoraï et le "Kitin" se chargèrent dans un assaut mortel... et quand cela fut fini, la clémence des Kamis se pencha sur le corps à l'agonie de leur protégé.
C'est ce moment que choisi "le kitin", qui, de la pointe d'un dard perfora la graine de vie interdisant à jamais le retour à la vie d'Oloon-Zeï.
S'enveloppant des ombres des Primes Racines, se lovant dans la noirceur de sa nuit éternelle, la créature disparue. Comme les relents d'une fumerole viciée, s'échapèrent, à sa traîne, ces murmures :
"...Cinquante-et-un... Plus que quatre..."
(à suivre)
Last edited by shantag on Tue Jul 22, 2008 6:51 am, edited 1 time in total.
Re: Le cinquième peuple.
« Je creuse là-bas,- Dyx montra un monticule ceint par quatre fanions posés la veille par l’équipe de repérage-, je te laisse le soin de t’occuper de Notre Majesté Ma Soeur...»
Intuitivement, il évita la pioche que venait de lui lancer Hécate… Mauvaise humeur fraternelle prévisible.
- D’accord Dyxi, une heure et je passerai relever ta récolte. Bon forage ! »
Ses sacs de toile dans le dos, sa pioche en main, le siamois sifflotait une rengaine des légions fyros ; il se sentait le cœur à la tâche.
De mémoire d’ami, Argran avait toujours vu Dyx de bonne humeur dès qu’il fallait tremper les mains dans la sève de l’Écorce pour en extraire ses joyaux.
Des outils neufs, un jus de shooky bien frais et bien sucré, la promesse d’une journée de labeur même sous le soleil ardent, et vous faisiez fleurir un sourire radieux sur la face féline et joviale du frère siamois.
Dyx était d’un naturel facile à vivre, tout le contraire de sa sœur.
Physiquement, "les siamois" avaient partagé les mêmes traits fins qui avaient valu au jeune frère d’être longtemps pris pour la sœur jumelle d’Hécate lorsqu’ils étaient enfants.
Heureusement, à l’orée de l’âge adulte, ce qui ce définissait pour des critères « délicats » en tant qu'enfant, lui conférait à son grand avantage aujourd’hui une beauté surréaliste.
Quant à Hécate, ses atours d’homine gagnaient leur pleine sensualité. Gênée du regard changé des homins la fréquentant, et en particulier par celui d’Argran qui semblait ne plus vouloir se contenter des quelques chastes baisers, elle ensevelissait sous des vêtements amples les charmes de son corps changeant.
Sa démarche naturelle, qu’elle corrigeait par une attitude plus rude en groupe, était un envoûtement né du doux balancement de ses hanches.
Elle avait aussi une manière inconsciente d’arrêter une conversation par un jeu singulier de battements de cils.
Bien malgré elle, son regard devenait soudain plus intense, plus appuyé interdisant au mot suivant de son interlocuteur de corrompre les secondes où la Grâce elle-même venait se prélasser dans les yeux émeraude de la jeune homine.
Quant elle s’apercevait du trouble qu’elle faisait naître, elle était prise d’un tic lui renfrognant son nez et excitait le canal lacrymal de son œil droit à tel point que sa paupière battait anormalement vite. Elle prétextait une poussière et « s’enfuyait ».
Le seul vrai mauvais équilibrage entre les faux jumeaux était leur caractère : L’un doux, adorable, serviable et l’autre, quant à elle, était, excessive… Trop excessive en fait !
D’un ton morne et suffisant, Hécate interpella son « amoureux » :
- Argran, ramasse ma pioche… elle est tombée trop loin.
- Pourquoi l’avoir jetée alors ?
- …Ramasse-la.
Il alla quérir la pioche de son « Impérieuse petite amie ».
En la ramassant, le souvenir de sa récente conversation avec son père vint tinter au seuil de sa conscience. Il fit taire ses voix non sans les avoir entendu lui susurrer… « Laisse-la, elle reviendra vers toi d’elle-même…Je sais comment faire avec elle… ha oui ?! Impressionnant, quelle assurance mon fils… »
Avec la même nonchalance, « Notre Majesté Ma Sœur » fit tomber du flanc de son mektoub une natte tressée.
La retenant par un coin elle la laissa se dérouler en la tirant derrière elle.
Une main au-dessus de ses yeux, elle plissa le regard et avisa un vallon au bas de leur dune.
Les mouvements lents de grands pétales en calice des plantes grasses projetant des ombres rondes et rafraîchissantes retinrent l’attention d’Hécate.
Un sourire délictueux en dessein esquissé de ses lèvres, la siamoise fit quelques pas traînants en direction du plant sauvage de shookys.
- Euh… Hécate ma belle, par là c’est pas un site de forage, - elle venait de s’arrêter pour boire de longues gorgées d’eau de miel-, … au cas où tu le saurais pas et… L’eau ! Hécate ! Pas maintenant ! C’est pour l’heure du zénith !
La sœur n’eut aucune considération pour cet avertissement. Argran, impuissant, regarda la mollesse de l’outre l’emporter peu à peu sur sa pleine rotondité.
Hécate ne buvait pas, elle se gorgeait littéralement d’eau.
Après une ultime lampée sifflante elle lâcha :
- Je reprends des forces ! Je suis fourbue par cette marche et si je suis épuisée, je n’arrive pas, comme je te le l’ai dit des centaines de fois -mais tu retiens rien-, à faire jaillir les sources de Mitexi !!!, - Elle prit un ton malicieux teinté de suffisance « féminine » pour la suite- … et si tu t’étais montré un tantinet courageux tout à l’heure face à Dregan pendant qu’il me faisait goûter la poussière d’écorce, je ne serai pas aussi assoiffée! »
Argran marmonna :
- Tu l’as cherché aussi…
- Quoi ?! C’est ça mon héros ?! Et si un varynx me saute dessus tu diras « tu l’as cherché » ?
- Boarf… les prédateurs ne se bouffent pas entre eux, tu crains rien !
- Quoi !?! Espèce d’imbécile ! Pour la peine je bois ta ration d’eau !!!
Argran tendit une main molle vers elle. Une tentative vaine d’empêcher le sort définitif du reste de l’outre.
Il bouillait intérieurement.
- Tu es…
- Oui ?
- … Incorrigible.
- Juste fragile et féminine espèce de rustre !
Elle avait campé ses délicates mains sur ses hanches. Le vent jouait dans les plis de sa jupe longue et révélait par l’interstice d’une broderie habile ses longues jambes galbées. Sa chevelure en crinière blanche avait la légèreté de la soie. La facétie du vent l’emmenait se lover d’une épaule à l’autre.
Puis lorsque le zéphir faiblissait, elle retombait en chatouillant le creux de son dos échancré par la découpe en losange de sa robe de foreuse.
À cette distance, Argran fut happé par son charme de princesse sauvageonne, même avec ses frusques dépareillées. Elle avait ce regard indéfinissable pétillant de colère ou bien de malice…
Il ne se sentait toutefois pas la force de continuer à lui tenir tête.
- Laisses, je serai un peu plus loin vers l’ouest au cas où tu déciderais de venir chercher ta pioche pour nous aider.
- Et moi je serai sous ces shookys si d’aventure vous avez besoin des conseils d’une homine éclairée. Je vais échanger quelques mots avec mon Kami, ne me dérangez pas !
Il soupira, elle eut un sourire narquois. Il l’aurait étranglé… Le coup du compagnon kami imaginaire revenait de plus en plus souvent, il avait remplacé ses migraines soudaines quand il tentait des étreintes enflammées, aiguillonné qu’il était par le désir qu’elle faisait brûler de plus en plus en lui…
- Tu te reposes combien de temps ?,- elle lui lança un regard furibond-, Heu, tu vas avoir une courte, longue ou interminable conversation avec ton… hum… ton « kami » ?
- Myr’Myx m’a choisi, c’est lui qui décide combien de temps il compte m’arracher à la réalité de ce monde fade et puis… qu’est ce tu fais encore là ?! Va ! Ouste ! Au travail !
Le fils Texen tourna les talons et shoota de rage dans le bric-à-brac de forage. Il sautilla aussitôt sur un pied en grondant : son gros orteil avait testé avec enthousiasme la résistance d’un objet dur caché au milieu des sacs de toile. Un « Bien fait… » lui assura qu’Hécate l’avait vu en train de danser grossièrement sur un pied avant que les hoquets de son rire moqueur ne disparaissent derrière la première rangée des plantes grasses. Tombant à genoux, il jeta furieusement tous les sacs et trouva un morceau de carapace éclatée. Les picots jaune orange parcheminant la cuirasse éraflée indiquèrent que le morceau avait appartenu à un représentant du règne des mégas insectes : un crustacé géant, un charognard du désert, un goari.
- Saleté !
Argran s’évertua à tirer de toutes ses forces sur la carapace traîtresse sans succès.
Elle semblait retenue par des racines au plus profond de la dune.
Il fouailla le sable à deux mains autour de la pointe émergée de la bestiole, puis il abandonna après une dizaine de pelletés : Le sable trop fin s’écoulait sans cesse dans le simulacre de tranchée.
Le morceau de chitine apparemment était très long et le temps manquait pour se lancer dans des fouilles archéologiques… Ils devaient revenir au camp de base avant tous les autres et avec au minimum six sacs de mitexi débordants.
Il ne fallait pas compter sur l’aide d’Hécate avant une bonne heure, voir au pire deux heures et Dyx chercherait à faire un sac de matières pures à un moment où à un autre ce qui lui prendrait bien trois heures.
Il abandonna là l’aileron de carcasse émergé des flots de sable, et il s’engagea à son tour vers le site de forage de l’ouest.
Le début de l’après-midi était bien engagé. Ils étaient en retard… Argran jeta un œil en direction d’Hécate. Le carré de natte s’étendait entre les shookis et la rebelle homine s’y était installée…
Il marmonna : « Drôle de manière de parler à un esprit Kami, allongée sur le dos… à part pépier avec les Ybers ou compter les gouttes de nectar tombant des pétales des shookis, j’imagine pas que le Myr’Mix ait dressé un hamac invisible juste au-dessus d’elle justifiant de sa position toute personnelle pour prier… je vais lui creuser un sac, sinon mon père va lui tomber dessus et… il lui interdira de revenir avec nous, et moi, sans elle… »
Il était asservi, comme son père le fut avant lui, et son père avant eux, et le père de son père encore avant… finalement, cette pensée le rassura.
Il s’en alla vers le site de forage de l’ouest, amoureux, aveugle consentant et heureux que cela soit.
(à suivre... un remaniement du texte 2 me permettra de le raccourcir et de le rendre plus agréable à la lecture)
Intuitivement, il évita la pioche que venait de lui lancer Hécate… Mauvaise humeur fraternelle prévisible.
- D’accord Dyxi, une heure et je passerai relever ta récolte. Bon forage ! »
Ses sacs de toile dans le dos, sa pioche en main, le siamois sifflotait une rengaine des légions fyros ; il se sentait le cœur à la tâche.
De mémoire d’ami, Argran avait toujours vu Dyx de bonne humeur dès qu’il fallait tremper les mains dans la sève de l’Écorce pour en extraire ses joyaux.
Des outils neufs, un jus de shooky bien frais et bien sucré, la promesse d’une journée de labeur même sous le soleil ardent, et vous faisiez fleurir un sourire radieux sur la face féline et joviale du frère siamois.
Dyx était d’un naturel facile à vivre, tout le contraire de sa sœur.
Physiquement, "les siamois" avaient partagé les mêmes traits fins qui avaient valu au jeune frère d’être longtemps pris pour la sœur jumelle d’Hécate lorsqu’ils étaient enfants.
Heureusement, à l’orée de l’âge adulte, ce qui ce définissait pour des critères « délicats » en tant qu'enfant, lui conférait à son grand avantage aujourd’hui une beauté surréaliste.
Quant à Hécate, ses atours d’homine gagnaient leur pleine sensualité. Gênée du regard changé des homins la fréquentant, et en particulier par celui d’Argran qui semblait ne plus vouloir se contenter des quelques chastes baisers, elle ensevelissait sous des vêtements amples les charmes de son corps changeant.
Sa démarche naturelle, qu’elle corrigeait par une attitude plus rude en groupe, était un envoûtement né du doux balancement de ses hanches.
Elle avait aussi une manière inconsciente d’arrêter une conversation par un jeu singulier de battements de cils.
Bien malgré elle, son regard devenait soudain plus intense, plus appuyé interdisant au mot suivant de son interlocuteur de corrompre les secondes où la Grâce elle-même venait se prélasser dans les yeux émeraude de la jeune homine.
Quant elle s’apercevait du trouble qu’elle faisait naître, elle était prise d’un tic lui renfrognant son nez et excitait le canal lacrymal de son œil droit à tel point que sa paupière battait anormalement vite. Elle prétextait une poussière et « s’enfuyait ».
Le seul vrai mauvais équilibrage entre les faux jumeaux était leur caractère : L’un doux, adorable, serviable et l’autre, quant à elle, était, excessive… Trop excessive en fait !
D’un ton morne et suffisant, Hécate interpella son « amoureux » :
- Argran, ramasse ma pioche… elle est tombée trop loin.
- Pourquoi l’avoir jetée alors ?
- …Ramasse-la.
Il alla quérir la pioche de son « Impérieuse petite amie ».
En la ramassant, le souvenir de sa récente conversation avec son père vint tinter au seuil de sa conscience. Il fit taire ses voix non sans les avoir entendu lui susurrer… « Laisse-la, elle reviendra vers toi d’elle-même…Je sais comment faire avec elle… ha oui ?! Impressionnant, quelle assurance mon fils… »
Avec la même nonchalance, « Notre Majesté Ma Sœur » fit tomber du flanc de son mektoub une natte tressée.
La retenant par un coin elle la laissa se dérouler en la tirant derrière elle.
Une main au-dessus de ses yeux, elle plissa le regard et avisa un vallon au bas de leur dune.
Les mouvements lents de grands pétales en calice des plantes grasses projetant des ombres rondes et rafraîchissantes retinrent l’attention d’Hécate.
Un sourire délictueux en dessein esquissé de ses lèvres, la siamoise fit quelques pas traînants en direction du plant sauvage de shookys.
- Euh… Hécate ma belle, par là c’est pas un site de forage, - elle venait de s’arrêter pour boire de longues gorgées d’eau de miel-, … au cas où tu le saurais pas et… L’eau ! Hécate ! Pas maintenant ! C’est pour l’heure du zénith !
La sœur n’eut aucune considération pour cet avertissement. Argran, impuissant, regarda la mollesse de l’outre l’emporter peu à peu sur sa pleine rotondité.
Hécate ne buvait pas, elle se gorgeait littéralement d’eau.
Après une ultime lampée sifflante elle lâcha :
- Je reprends des forces ! Je suis fourbue par cette marche et si je suis épuisée, je n’arrive pas, comme je te le l’ai dit des centaines de fois -mais tu retiens rien-, à faire jaillir les sources de Mitexi !!!, - Elle prit un ton malicieux teinté de suffisance « féminine » pour la suite- … et si tu t’étais montré un tantinet courageux tout à l’heure face à Dregan pendant qu’il me faisait goûter la poussière d’écorce, je ne serai pas aussi assoiffée! »
Argran marmonna :
- Tu l’as cherché aussi…
- Quoi ?! C’est ça mon héros ?! Et si un varynx me saute dessus tu diras « tu l’as cherché » ?
- Boarf… les prédateurs ne se bouffent pas entre eux, tu crains rien !
- Quoi !?! Espèce d’imbécile ! Pour la peine je bois ta ration d’eau !!!
Argran tendit une main molle vers elle. Une tentative vaine d’empêcher le sort définitif du reste de l’outre.
Il bouillait intérieurement.
- Tu es…
- Oui ?
- … Incorrigible.
- Juste fragile et féminine espèce de rustre !
Elle avait campé ses délicates mains sur ses hanches. Le vent jouait dans les plis de sa jupe longue et révélait par l’interstice d’une broderie habile ses longues jambes galbées. Sa chevelure en crinière blanche avait la légèreté de la soie. La facétie du vent l’emmenait se lover d’une épaule à l’autre.
Puis lorsque le zéphir faiblissait, elle retombait en chatouillant le creux de son dos échancré par la découpe en losange de sa robe de foreuse.
À cette distance, Argran fut happé par son charme de princesse sauvageonne, même avec ses frusques dépareillées. Elle avait ce regard indéfinissable pétillant de colère ou bien de malice…
Il ne se sentait toutefois pas la force de continuer à lui tenir tête.
- Laisses, je serai un peu plus loin vers l’ouest au cas où tu déciderais de venir chercher ta pioche pour nous aider.
- Et moi je serai sous ces shookys si d’aventure vous avez besoin des conseils d’une homine éclairée. Je vais échanger quelques mots avec mon Kami, ne me dérangez pas !
Il soupira, elle eut un sourire narquois. Il l’aurait étranglé… Le coup du compagnon kami imaginaire revenait de plus en plus souvent, il avait remplacé ses migraines soudaines quand il tentait des étreintes enflammées, aiguillonné qu’il était par le désir qu’elle faisait brûler de plus en plus en lui…
- Tu te reposes combien de temps ?,- elle lui lança un regard furibond-, Heu, tu vas avoir une courte, longue ou interminable conversation avec ton… hum… ton « kami » ?
- Myr’Myx m’a choisi, c’est lui qui décide combien de temps il compte m’arracher à la réalité de ce monde fade et puis… qu’est ce tu fais encore là ?! Va ! Ouste ! Au travail !
Le fils Texen tourna les talons et shoota de rage dans le bric-à-brac de forage. Il sautilla aussitôt sur un pied en grondant : son gros orteil avait testé avec enthousiasme la résistance d’un objet dur caché au milieu des sacs de toile. Un « Bien fait… » lui assura qu’Hécate l’avait vu en train de danser grossièrement sur un pied avant que les hoquets de son rire moqueur ne disparaissent derrière la première rangée des plantes grasses. Tombant à genoux, il jeta furieusement tous les sacs et trouva un morceau de carapace éclatée. Les picots jaune orange parcheminant la cuirasse éraflée indiquèrent que le morceau avait appartenu à un représentant du règne des mégas insectes : un crustacé géant, un charognard du désert, un goari.
- Saleté !
Argran s’évertua à tirer de toutes ses forces sur la carapace traîtresse sans succès.
Elle semblait retenue par des racines au plus profond de la dune.
Il fouailla le sable à deux mains autour de la pointe émergée de la bestiole, puis il abandonna après une dizaine de pelletés : Le sable trop fin s’écoulait sans cesse dans le simulacre de tranchée.
Le morceau de chitine apparemment était très long et le temps manquait pour se lancer dans des fouilles archéologiques… Ils devaient revenir au camp de base avant tous les autres et avec au minimum six sacs de mitexi débordants.
Il ne fallait pas compter sur l’aide d’Hécate avant une bonne heure, voir au pire deux heures et Dyx chercherait à faire un sac de matières pures à un moment où à un autre ce qui lui prendrait bien trois heures.
Il abandonna là l’aileron de carcasse émergé des flots de sable, et il s’engagea à son tour vers le site de forage de l’ouest.
Le début de l’après-midi était bien engagé. Ils étaient en retard… Argran jeta un œil en direction d’Hécate. Le carré de natte s’étendait entre les shookis et la rebelle homine s’y était installée…
Il marmonna : « Drôle de manière de parler à un esprit Kami, allongée sur le dos… à part pépier avec les Ybers ou compter les gouttes de nectar tombant des pétales des shookis, j’imagine pas que le Myr’Mix ait dressé un hamac invisible juste au-dessus d’elle justifiant de sa position toute personnelle pour prier… je vais lui creuser un sac, sinon mon père va lui tomber dessus et… il lui interdira de revenir avec nous, et moi, sans elle… »
Il était asservi, comme son père le fut avant lui, et son père avant eux, et le père de son père encore avant… finalement, cette pensée le rassura.
Il s’en alla vers le site de forage de l’ouest, amoureux, aveugle consentant et heureux que cela soit.
(à suivre... un remaniement du texte 2 me permettra de le raccourcir et de le rendre plus agréable à la lecture)
Last edited by shantag on Wed Jul 23, 2008 12:36 am, edited 1 time in total.
S'essayant dans une histoire sans fin Le Cinquième Peuple
Inspiré par ce recueil
Et fan de ce cher JonLajoie
Inspiré par ce recueil
Et fan de ce cher JonLajoie
Re: Le cinquième peuple.
Qu'elles sont mauvaises ses homines, toujours a faire souffrir ses purs et innocents homins profitant de notre aveuglement sentimental.
http://zorai.forumzen.com/index.forum
"Ce quon ne désire pas pour soi, ne pas le faire à autrui."
Confucius
Re: Le cinquième peuple.
Salut,
J'aime bien aussi !
Vivement la suite.
Redoutable homines, leurs plaisir, c'est de nous savoir en leur pouvoir..oups.
J'aime bien aussi !
Vivement la suite.
Redoutable homines, leurs plaisir, c'est de nous savoir en leur pouvoir..oups.