Histoire de guerre

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coco76
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Joined: Sat Jun 17, 2006 5:48 am

Histoire de guerre

Post by coco76 »

J’ouvre les yeux.
Je suis dans une cabane en bambou, je regarde autour de moi. Je vois une lance, elle a des reflets violets avec des inscriptions. Quelques caisses jonchent le sol, recouvertes de poussière. J’ai un bouclier dans la main, il semble avoir pris des coups.
Je suis fatigué.
Je referme les yeux un instant comme pour profiter de la douceur des rayons de soleil qui pénètrent entre les bambous. Quelques gazouillis se font entendre, puis un rugissement.
UN RUGISSEMENT !
Je me lève d’un bond. Je me retourne, je vois la porte en bambou, et de la sève partout sur le sol.
DE LA SEVE !
- Que s’est-il passé ici ?
Ses mots s’échappent de ma bouche mais je suis seul.
J’ouvre la porte tout en saisissant la lance machinalement.

Des arbres magnifiques, majestueux, gigantesques abritent toutes sortes d’oiseaux colorés. La végétation est dense, des arbustes et des bambous partout autour des troncs occupent le sol sous le feuillage et les lianes des grands arbres. Les rayons de soleil du matin font resplendire ce spectacle merveilleux.
De la lance que je viens de saisir, sortent des petits arcs électriques.

Je me souviens.
Je me nomme Ki Zhan. Je suis un guerrier de l’armée Zoraï, assigné à un petit groupe chargé de repérage. Cette lance et ce bouclier sont MA lance et MON bouclier, ils m’ont accompagnés durant tant de combats.
J’inspecte mon corps bleu, je suis habillé d’une simple tenue faite de feuilles, de fibres et d’huile, probablement de gulatch. Je n’ai pas l’air blessé, ce n’est donc pas ma sève dans la cabane.
Un frisson me parcourt l’échine.
Je suis dans la jungle, je la connais très bien mais j’ignore où je me trouve.

J’aperçois une clairière.
Une marre.
J’ai soif.
Je m’approche d’un pas pressé. Mes deux genoux touchent le sol en même temps, je me penche et je bois. L’eau est fraiche.
Douleur vive dans la jambe droite.
En un éclair, je me retourne et dans un cri de rage je transperce le petit animal qui m’a mordu. Je me redresse, je n’en reviens pas. Je ne me souvenais même pas que j’étais capable de frapper si vite. L’animal est petit, aux poils cours, un long museau, une queue sans poil.
Un ragus.

Je suis maintenant parfaitement éveillé. Je cours à toute vitesse jusqu’à la petite cabane.
Je fouille, la poussière me pique les yeux.
Un morceau de tissus.
Je l’entoure autour de ma jambe. La morsure est superficielle, je ne crains rien.
Je m’assois, les jambes croisées.
La position de méditation.
Ma main se pose dans la sève.
Je médite, tout mes sens sont exacerbés. Il fait plutôt frais, mais il fera bientôt très chaud. La sève est tiède. J’entends le bruissement des feuilles, les gazouillis des oiseaux, les petits cris des ragus qui viennent de découvrir la dépouille de leur congénère qui va leur servir de repas. Je sens l’odeur de la sève, l’odeur des fleurs, des arbres, des ragus.
C’est la sève d’un frère !
LA SEVE D’UN ZORAÏ !
La mienne se réchauffe, je la sens passé à toute vitesse dans ma graine. Mais je conserve mon calme, je suis un Zoraï, pas un Fyros.

Je ramasse ma lance et mon bouclier.
Je me lance à toute vitesse dans la jungle comme guidé par une force invisible. Mes jambes et mes bras, habitués à la course en forêt, enjambent les obstacles et repoussent tout ce qui me barre la route. J’ai l’impression de glisser entre les branches, les ronces, les racines.
Un grognement.
Je stoppe nette.
Une imposante bête me fixe, le cuir brun, une corne lui prolonge la mâchoire inférieure, tout ses muscles sont contractés, prêt à bondir.
Un torbak !
TROIS TORBAKS ! Je viens d’en apercevoir deux autres plus petits à ses cotés.

Je place ma jambe gauche, ma jambe la plus robuste maintenant, en arrière. Le bras gauche porte mon bouclier en avant. Le droit tient fermement la lance légèrement en retrait. Ma respiration s’accélère, ma sève circule à toute vitesse dans mes veines.
Réflexe.
J’ai été formé à l’art de la guerre. Depuis très jeune, je m’entraine à me battre. Mon maître m’a appris à ne faire qu’un avec mes armes. Ma jambe gauche est en arrière afin d’avoir un appui solide. Mon bouclier est placé de la meilleure façon pour me protéger. Ma lance est prête à frapper. Ma respiration et la vitesse de ma sève me prépare à agir en un éclair. Tout ça je l’ai appris, maintenant ce n’est plus qu’un réflexe.

Le torbak de gauche bondit, le combat commence. Je réagis immédiatement, et avant que ses crocs n’entrent dans la chaire de mon bras, je me protège grâce à mon bouclier. Le coup est si puissant que le torbak est projeté. Aussitôt, je transperce l’air avec ma lance. Le plus imposant des torbaks a aussi bondit vers moi. Ma lance pénètre dans sa gorge, cette zone n’étant pas protégée par l’épais cuir. Ses veines, sa trachée éclatent. Ma lance finie sa course, j’entends le craquement de sa colonne vertébrale brisée par la pointe de mon arme. Quasiment au même instant, je pivote sur moi-même pour amener mon bouclier de l’autre coté pour me protéger du dernier torbak qui vient de bondir à ma droite. Je le repousse sans soucis.
Je me remets immédiatement en position, face aux deux torbaks.
L’attaque est fulgurante.
Je frappe, je tourne, je frappe…
Cris.
Craquements d’os.
Sève.
Hurlements.
Gémissements.

Je retire ma lance du corps inerte d’un torbak, elle y laisse une plaie laissant s’échapper sa sève qui coule doucement sur son cuir. Les trois torbaks gisent à terre dans un bain de sève.

Je reprends la route.
Après des heures de course, je suis épuisé. Je m’arrête pour me reposer quelques instants. Des bruits de pas se font entendre. Je bloque ma respiration et je me concentre sur le bruit. Les bruits de pas proviennent de plusieurs homins, visiblement plutôt maladroit dans la jungle. Je me faufile dans la végétation, je pousse quelques feuilles qui bloquent ma vision…
Et je les vois !
Les tueurs de mes frères dont j’aperçois les corps inertes quittés par la sève.
Ils sont environ une quarantaine. Les tueurs marchent en formation sur un petit chemin.
Ils portent des armures qui semble être directement taillées dans du bois. Leurs armes, d’une grande finesse, projettent de l’acide.
DES MATIS !
Ce sont des Matis Karavaniers, la marque de Jena est présente partout.

J’écoute attentivement.
- …Zora… Jen-laï…
- …nuit… on attendra…
- … faudra… attention… les Zoraïs… forts…
- … message….
- … le… nous diras comment… pour prendre d’a… laï…
- Les serviteurs des démons périront !

J’entendis parfaitement la dernière cette dernière phrase criée par l’un d’entre eux. Mais elle ne retient pas mon attention. Je me concentre sur l’avant dernière… le… le chef probablement, nous diras comment… faire pour prendre…
POUR PRENDRE D’ASSAUT JEN-LAÏ !

Je m’écarte prudemment, puis je me lance à toute vitesse dans la jungle. Je dois arriver avant eux. Ce ne sera pas bien difficile.

Une journée plus tard, j’arrive à destination.
La brume matinale se disperse peu à peu et Zora se dévoile à mes yeux.
La majestueuse capitale des Zoraïs.
Je cours à travers la cité sous les yeux surpris des passants. Mes poumons me brulent, j’ai les jambes en feu, ma sève va à toute vitesse, mais dans un dernier effort je m’élance dans les couloirs des appartements des dirigeants Zoraïs.
Je frappe à la porte de Ying
Zayong, le chef de l’armée Zoraï. Le grand Zoraï, dont le corps est couvert de cicatrices, apparaît devant moi. Avant qu’il ne puisse dire quoique ce soit, je lui souffle :
- Des Matis, des Karavaniers, Jen-laï… ils vont attaqués…
- Reprends tes esprits mon frère.
Je prends un instant pour reprendre mon souffle.
- J’ai découvert le plan d’une quarantaine de Matis, ils vont attaqués Jen-laï cette nuit. Ils vont contournés Zora, et prendrons d’assaut la ville quand les gardes seront au minimum de leur effectif. Ils tueront la dizaine de gardes qui patrouillent, puis n’auront plus qu’à assassiner les autres dans leur sommeil.
- Je n’ai presque pas de soldats disponibles, une dizaine tout au plus mais nous seront plus de soixante une fois les gardes de Jen-laï réveillés.

Nous allons avertir les soldats de se préparer. Après avoir pris mon armure lourde et ma massue, je rejoints les autres pour partir en direction de la ville au centre des attentions.

Arrivés sur place, Ying avertit les gardes de ce qui nous attend.
- Vous nous avez envoyés un message demandant de laisser la garnison minimum ici pour aider Min-Cho à faire face à une attaque !
A peine le garde eu finit, je comprends immédiatement, les Matis ont envoyés un faux message pour s’assurer la victoire.
Les onze soldats de Zora, les seize gardes présents, Ying et moi, nous sommes vingt-neuf.
Vingt-neuf contre quarante.

Je suis caché derrière le mur d’une maison. Je respire lentement, tout est calme, la tempête est proche. Comme moi, les autres soldats sont cachés un peu partout. L’effet de surprise est retourné contre les agresseurs. La nuit tombe paisiblement, les Izams ont arrêtés de chanter. La douceur s’installe, les étoiles s’allument une à une dans le ciel bleuté. Les petits insectes luisants commencent leur bal qui durera toute la nuit.
Spectacle dont on ne se lasse jamais.
J’aime la jungle.
Je mourrais pour la jungle s’il le faut.

Les heures passent. La douceur du crépuscule a cédé sa place à la fraicheur de la nuit. Le ciel est magnifique, l’astre de la nuit nous éclaire de sa lumière pâle. Un petit yubo passe, cherchant dans la ville quelques restes pour se nourrir.

Nous y sommes.
Le garde posté sur une hauteur proche de la ville a repéré les fidèles de Jena. Je serre ma lance et mon bouclier.
Les Matis entrent dans la cité. Je jette un coup d’œil, ils semblent déconcertés de ne voir aucun garde. Ne s’attendant absolument pas à notre surprise, ils commencent à se disperser dans les ruelles.

J’écoute attentivement, des pas se rapprochent de ma position. Les pas d’un seul homin. Je saisis alors ma dague, cachée dans mon armure. Il se rapproche de plus en plus. Je suis prêt. Il apparaît dans l’angle de la maison. Je bondis sur lui, une main sur sa bouche pour qu’il ne puisse pas appeler à l’aide. Je l’égorge, je reçois une giclé de sève sur mon visage. J’amortis sa chute et le traine à l’abri des regards.

Un cri perce le silence de la nuit.
Puis un Matis hurle :
- Les Zoraïs sont là ! Ils défendent la ville !
Terminé l’effet de surprise. J’ignore combien sont déjà mort.
Je me dirige vers l’endroit d’où provenait l’ordre.
J’approche, je l’aperçois. Il semble être le chef et il est accompagné d’un soldat.
Je m’élance, lance en main. Je fais quelques pas, je lance mon bras droit en arrière puis le propulse rapidement en avant. Ma lance s’envole. Elle s’enfonce dans l’épaule du soldat, entre deux plaques d’armures.
Chance.
Je prends ma massue d’où jaillisse immédiatement des éclairs et je fonce vers le chef qui fait de même avec sa pique.
Neuf mètres.
Huit mètres.
Sept mètres.
Six mètres.
Il brandit sa pique, je continue à courir.
Cinq mètres.
Quatre mètres.
Je place ma masse légèrement en arrière, à coté de ma tête.
Trois mètres.
Deux mètres.
J’esquive de justesse la pointe de son arme.
Encore un pas.
Je frappe de toutes mes forces, mais il esquive à son tour. Après avoir reculé, il retente de me transpercer. Cette fois, il touche sa cible. Mon armure m’a protégée mais je sens la pointe s’enfoncer légèrement dans mon ventre. Je lui assène un violent coup sur sa tête. Son casque éclate. Ma massue lui enfonce le crane.
Craquement.
Giclé de sève.
Un autre Matis arrive dans mon dos mais je l’entends. J’attends.
Au dernier moment, je me retourne. Et avec la pique de son propre chef je le transperce. La pique ressort de l’autre coté de son corps. Il pousse un hurlement de douleur puis s’effondre.
Je connais bien les failles des armures, et j’ai de la chance.
Un bon début.

J’entends vaguement un ordre de Ying. J’accours, massue en main, à travers les ruelles.
Je tombe sur le corps sans vie d’un frère. Juste devant, celui d’un Matis, blessé. Il me lance un regard suppliant, je lève ma massue.
Il me cri quelque chose dans sa langue, probablement " épargne moi ". Ma massue s’abat sur lui.
Choc sourd.
Craquement.
Sève.

Je reprends ma course.

J’arrive sur une place dégagée. Les Zoraïs se sont rassemblés. Nous sommes plus qu’une quinzaine. En face de nous les Matis, une bonne vingtaine.
L’écart s’est réduit.

Les deux groupes d’homins s’élancent l’un vers l’autre. Chacun brandissant son arme et criant.
Choc.
Le combat fait rage. On entend des hurlements, des gémissements. De la sève coule partout. Je frappe, je broie des os, je fais éclater la chaire.
Ma massue entre en collision avec le dos d’un adversaire.
Dans un craquement, sa colonne vertébrale cède. Ma massue m’échappe des mains.
Vive douleur.
Une hache vient de se planter dans mon épaule. La douleur est terrible. Je m’effondre à terre dans la sève et les cadavres. Je suis couvert de sève, je rampe et trouve une épée. Je me relève.
Ying et un autre Zoraï sont à mes cotés, il reste deux Matis. Je brandis mon épée. La lame fend l’air… mais il est plus rapide et son coup de hache dans ma tête m’envoie à terre. Mon casque a fait son travail mais je suis sonné.
Je souffre.
Ying Zayong tue mon agresseur pendant que l’autre Zoraï achève le deuxième Matis. La sève gicle encore une fois et je perds connaissance.

J’ouvre les yeux.
Je suis au milieu de corps sans vie. Recouvert de sève, dont la mienne, je suis blessé à de multiple endroits.
Douleur.
Je me souviens.
Je me nomme Ki Zhan. Je suis un guerrier de l’armée Zoraï. Zhan signifie " la guerre ". J’ai passé ma vie à la faire, maintenant c’est par elle que je meurs. Je devrais être fier d’avoir sauvé Jen-laï et mes frères. Mais je vais quitter l’écorce et je ne comprends que maintenant le pacifisme des Zoraïs.
Je ne meurs pas, je n’ai jamais été vivant.
Mes yeux se ferment, pour la dernière fois.
Pas de chaleur des rayons de soleil matinaux, juste la douleur et le froid de la nuit.
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brest92
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Joined: Fri Apr 29, 2005 3:23 pm

Re: Histoire de guerre

Post by brest92 »

Très beau récit ! bravo ! j'en frisonne encore :)
Lemra Ma Xue Zoraï libre
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