Journal de Titana
Le temps est magnifique aujourdhui. Comment est-ce possible ? Cela ne devrait pas être
Nous venons de perdre notre avant-poste, si durement acquis, tant espéré, tant rêvé. Le bastion de Jena dans le désert nest plus
Jai lutté vaillamment derrière les Marcheurs d'Atys, les relevant sans cesse au péril de ma vie. Maintes fois, je suis tombée ; à maintes reprises je fus relevée. Nos alliés et nous-mêmes avons tout tenté pour repousser les hordes kamistes
Mais comment lutter contre tant dhomins avides de vengeance ?
Nous sommes tombés
Notre avant-poste est tombé
Le bastion jénaïque dans le désert Fyros est tombé
Et moi, Titana, moi qui crois si fort en ma déesse et en mon peuple, jen suis soulagée
Soulagée. Oui, cest le mot qui convient. Qui pourrait le comprendre ? Qui pourrait comprendre à quel point, durant la bataille, je suis allée dhorreur en horreur ? En face de moi, ce nétait pas que de simples kamistes inconnus ! Non
Cela aurait été tellement plus simple pourtant ! Mais mon regard horrifié voyait des amis à moi, des kamistes et des neutres que jai connus dans les Lacs et que jai appris à apprécier, malgré notre différence de religion
Wouchi, Atrynx
Oh, Atrynx, que fais-tu ici ? Fuis ! Je ne supporterai pas de te voir à terre
Oh Jena, aide-moi ! Je suis encore en train de revivre cette scène horrible
Atrynx, toi le soigneur Tryker, mon ami, es de nouveau allongé à terre, face au sol. Je mapproche comme dans un cauchemar, ne voyant plus rien autour de moi, nentendant plus les cris de victoire de nos alliés. Tu es là, à mes pieds, victime dune guerre qui soudain na plus aucun sens
Je ne peux que magenouiller devant toi et rester là en attendant que ton dieu te rappelle à lui
Je veux que tout sarrête ! Donnez-leur notre avant-poste, de toutes façons ils vont le gagner ! Mais par pitié, que tout ceci sarrête ! Je ne veux plus voir de Marcheurs à terre, je ne veux plus voir mes amis sentretuer pour un bout de terre
Je ne veux plus le voir, lui, sans vie devant moi
Oh Jena, pardonne-moi ces pensées ! Je dois lutter pour mon bien si chèrement acquis, je dois lutter pour toi, pour mon peuple, pour les miens
Je retourne sur le champ de bataille, même si je dois soigner les yeux fermés
Et voilà, tout recommence
Nous nous faisons décimer par larmée ennemie
Et moi, je ne pense quà une chose : pourvu quAtrynx soit à labri ! Il faut que je me raisonne
Que je me concentre
Relever les Marcheurs
Ne pas les laisser mourir
Jena, aide-nous ! Ils sont trop nombreux ! Oh, je me sens mourir
Je suis au sol
Nous sommes tous au sol
Ces cris de victoire que jentends, ce ne sont plus les nôtres
Atrynx ! Où es-tu ? Es-tu en train de fêter notre mort, toi aussi ? Oh, je te vois
Tu tapproches de moi doucement, et dépose une fleur devant moi. Tu as lair si triste ! Se pourrait-il que
? Non, je ne veux pas y penser
Je sens Jena qui me rappelle à elle
Adieu Atrynx
Je ne reviendrai pas ici ce soir
Tout est perdu
Oui, tout est fini
Je suis de nouveau dans mon appartement de Fairhaven, en train décrire sur ce parchemin. Je ne veux plus penser à tout ceci
Ne plus penser à Atrynx
Jena, je vais arrêter décrire et vais aller au temple dYrkanis te prier. Jarrive, attends-moi
*********************************************************
Prier Jena ma apaisée. Je retrouve peu à peu la paix intérieure. Je me force à ne pas penser à Atrynx et à me concentrer sur ma vie actuelle.
Je vis toujours avec Lao-Shan, et ce choix curieux ne semble pas plaire à tous les Marcheurs. Tant pis. Ils devront faire avec. Si cela peut les rassurer, je ne laime pas. Je ne lai choisi que pour tenter doublier enfin Nico.
Oh Nico, pourquoi es-tu parti à jamais ? La vie était tellement belle et simple avec toi ! Peut-être que les bras de Lao apaiseront un peu mon chagrin de tavoir perdu
Jai mis si longtemps à accepter ta disparition ! Je dois tourner la page
Pourquoi Lao-Shan ? Beaucoup de Marcheurs doivent se le demander sans oser men parler. Si je leur disais que je lai choisi parce quil est bien fait de sa personne, parce que nous avons le même caractère impossible, mais surtout pour protéger ma sur contre lui, ils ne comprendraient pas. Et pourtant
Lao a détruit la vie de Nymphéa, et sans Ser Amatsu, elle ne serait plus de ce monde aujourdhui. Mais Lao-Shan laime toujours et ne la laisse pas en paix. Tout ce que je peux faire pour tenter de les protéger contre lui, elle et sa famille, est de détourner lamour de Lao sur moi
Javoue que pour linstant, cest un échec. Il suffit de voir le regard quil lui porte lorsque nous la rencontrons pour me persuader du contraire.
Cependant, je reste avec lui. Je ne suis pas si mal après tout. Il voit toujours Amano, je le sais
Il ne saura jamais se contenter dune seule homine.
Pourquoi est-ce que je reste alors ? Pourquoi pas ? Je ne suis plus capable daimer
Nico est parti avec mon cur
pour toujours
Alors, quelle importance ?
Atrynx
Pourquoi est-ce que je viens décrire son prénom ? Je ne veux plus penser à lui
Il est kamiste, je suis karavanière, Jena me souffle sans cesse de ne plus penser à cet homin égaré. Alors je ny penserai plus
Aujourdhui, je vais aller forer dans les Lacs. Mon artisanat Tryker stagne en ce moment
Je suis à court de fibres une fois de plus. Léternel problème de lartisan
Nous passons plus de temps à forer quà tisser ! Je me demande si Atrynx voudrait maider
Oh non, voilà que je recommence ! Je-ne-dois-plus-penser-à-lui ! Oh Jena !!! Si tu ne maides pas, je vais lui écrire un mot dans la minute qui vient
Je DOIS le voir ! Même sans lui parler ! Juste le regarder et mimprégner de lui
Mais que marrive-t-il ? Quelles que soient mes pensées, elles reviennent toujours à lui ! Se pourrait-il que je
? Non ! Je ne veux même pas y penser ! Lamour est mort à jamais en moi, et puis
il est kamiste ! Mais cest aussi un homin merveilleux, ne pensant quà aider et soigner les autres, toutes races et religions confondues
Un homin comme on en voit peu.
Jena, pardonne-moi, je vais lui écrire. Je narriverai à rien faire de la journée si je ne le vois pas. Jirai te prier ensuite
Attends-moi
*********************************************************
Je lai vu et
ma vie a changé. Il na pas cru à mon prétexte pour le rencontrer. Je lai lu dans ses yeux.
Nous avions rendez-vous à la Source, au bord est du Lac. En lui proposant ce lieu, je nai pas songé un instant quil devrait venir du tp kami
et donc traverser des zones dangereuses pour me rejoindre. Ni que, pour parfaire lentrainement intensif quil suivait avec Ser Amatsu dans le but de combattre la Goo, il portait en permanence un bandeau sur les yeux, et ne pourrait donc pas lire mon message
Combien de temps sest-il écoulé entre le moment où il a reçu ma lettre et celui où quelquun la lui a lu ? Je lignore
mas pour moi, ce fut une éternité
Quand enfin il a ouvert un Lien télépathique avec moi, jai cru que mon cur allait cesser de battre. Il acceptait de me rencontrer !!! Ah, sa voix dans ma tête
Je lentends encore qui vibre au plus profond de mon âme
Je crois bien que je nai jamais fait aussi vite pour briser un cristal de sève ! Quelques secondes plus tard, la technologie de la Karavan mavait déjà amenée au téléporteur de la Source.
Lattente
Lattente interminable au bord du Lac, à rêver, à minquiéter, à tenter de me raisonner, à prier Jena pour quil arrive enfin.
Jena ? Pourquoi exaucerait-elle mon vu ? Atrynx nétait pas un de ses suivants ! Il nétait pour elle quun homin égaré et recueilli par les ténèbres de Ma Duk !
Je frissonne encore de ce que jai ressenti alors. Comme un pressentiment. Quelque chose allait arriver à Atrynx, Jena ne lui permettrait pas darriver en vie jusquà moi.
Je compris soudain : il venait forcément du téléporteur kami ! Oh Jena, es-tu si en colère contre moi pour ne pas mavoir soufflé ceci plus tôt ? Le chemin entre son téléporteur et le Lac est semé dembuches mortelles
Et toi, Atrynx, pourquoi ne mas-tu rien dit ? Nous aurions pu nous rencontrer ailleurs ! Jena, sil sen sort vivant, je te promets de tout faire pour loublier
Jai couru plus vite que jamais, enfilant promptement mes amplificateurs magiques sans arrêter ma course. Jai volé à sa rencontre, contournant le Lac par le sud. Et là, je lai vu. Une forme inerte au sol, à deux mètres seulement de leau salvatrice.
Comment nai-je pas crié ? Je lignore
Jai lancé plus de sorts salvateurs que nécessaire
je ne pouvais plus marrêter. Il sest assis, puis levé ; toute trace de blessure avait disparu grâce à la magie.
Son sourire
Je le revois encore
Et ses paroles ! Il ma dit que jétais la plus belle Matis des Lacs ! Je ne devrais pas y prêter attention, il y a fort peu de Matis dans Aeden Aqueus
Mais
je souris encore en écrivant ses mots
*********************************************************
Côte à côte.
Nous étions si proches en cet instant et pourtant si loin
Le Lac nous faisait face. Le soleil plongeait peu à peu en son sein, faisant danser sur leau une multitude de paillettes lumineuses variant de lorange clair au rouge sombre. Vision magique dont nous étions les uniques spectateurs
Josais à peine le regarder. Il était là, si près de moi, que je me sentais fondre comme un bloc de glace au milieu du désert Fyros.
Jena, je tai promis de tout faire pour ne plus penser à lui sil survivait ! Mais comment puis-je exaucer ma promesse alors que jentends son souffle paisible si près de moi ?
Je me suis allongée sur la sciure. Face au ciel étoilé. Jai regardé linfini pour my perdre à jamais
Sans mot dire, il sest allongé sur le dos, lui aussi, semblant regarder les étoiles.
"Raconte-moi ce que tu as ressenti sur le champ de bataille, Titana
"
Alors jai parlé
Jai raconté mes peurs, mes doutes, mes angoisses
Jai raconté lhorreur que jai éprouvée en te voyant, toi, Atrynx ODiggan, étendu à terre
Jai oublié les étoiles, jai oublié les Lacs, jai même oublié Jena. Je nétais plus quune homine perdue au milieu de labsurdité dune guerre.
Sa main.
Il venait de tendre son bras entre nous, et sa main ouverte attendait la mienne, à mi-chemin entre lui et moi, telle une promesse merveilleuse.
Je nai pas réfléchi.
* Jena pardonne-moi, mais je ne peux plus me contrôler. *
Nos mains forment à présent un lien entre nous. Toute mon âme est prise dans un tourbillon vertigineux, plongeant aveuglément dans cette sensation extrême de nos mains se touchant à travers nos gants de tissu fin.
Vaness, si tu me voyais ! Toi, mon amie si chère, celle que je considère comme ma sur ! Toi seule sais ce que je ressens pour lui ! Si seulement josais lui dire, à lui ! Mais quelque chose men empêche
Est-ce ma fierté Matis, est-ce mon amour de Jena, est-ce la peur devant ce fossé qui nous sépare ? Je lignore. Mais ces mots qui résonnent telle une évidence dans ma tête, même sur ce parchemin je nose les écrire
Un flot de parole sortit de ma bouche, telle une litanie secrète confiée à une oreille bienveillante. Atrynx ignorait encore que jétais avec Lao-Shan. Que son meilleur ami était devenu mon compagnon. Je sentais que je ne pouvais lui cacher cela. Les mots sont sortis tous seuls, racontant comment javais désespérément tenté doublier Nico, comment javais porté mon choix sur un Matis dans lunique but de sauver ma sur de lui.
Point épineux de ma vie, dont je ne suis pas très fière. Mais je lai fait pour elle
Pour Nymphéa. Pour quelle nait plus à vivre avec le fantôme de Lao-Shan la poursuivant sans cesse
et rodant telle une âme en peine, larme à la main, menaçant tour à tour chaque membre de sa famille.
Oh Jena, pourquoi ne mas-tu pas empêchée de dire pareille vérité ? Je savais que par ces mots, je risquais de perdre Atrynx à jamais. Mais je naurais pas pu garder la tête haute si je lui avais caché plus longtemps la vérité.
Soudain, il a compris.
"Lao-Shan
mon meilleur ami
Oh non
"
Son regard. Son visage soudain si blême. Le mouvement de recul quil a eu
Cétait atroce. Il sest levé dun bond et sest éloigné sans un mot, restant comme figé à une dizaine de pas de moi, me tournant le dos, transperçant mon cur par son silence plus sûrement que ne laurait fait son épée.
"Pardonne-moi
Je suis indigne de rester ici, avec toi
Je men vais
"
Et ces mots qui eurent tant de mal à sortir de mon gosier :
"Adieu Atrynx
"
Je me suis éloignée à pas lents mais résolus, mefforçant de ne pas ressentir ces mille aiguilles qui senfonçaient dans mon cur à chacun de mes pas
*********************************************************
"Attends, reviens !"
Un choc. Je me suis arrêtée net.
"Tu nas pas à ten aller
"
Lespoir à présent. Jai fermé les yeux et remercié muettement ma déesse.
Il me fallait maintenant me retourner et laffronter.
Je ne regrettai pas ce que javais fait avec Lao-Shan. Cela devait être tenté. Pour Nymphéa. Mais, malgré les dernières paroles rassurantes du Tryker, jétais terrifiée à lidée quil pourrait à présent me détester.
* Jena, donne-moi la force
*
Ce ne fut pas Jena qui maida, mais Atrynx lui-même, grâce à son lien télépathique. Jai soudain ressenti en moi une chaleur, douce et apaisante. La même que javais déjà ressentie sur le champ de bataille, alors quil tentait à sa manière de maider à supporter les horreurs de la guerre.
Jai fait demi-tour, cherchant inconsciemment son regard. Mais je nai rencontré quun bandeau sur ses yeux, celui-là même grâce auquel il parvenait à tenir à distance les effets ravageurs de la Goo.
Pourquoi ne ma-t-il pas laissé partir ? Se pourrait-il que lui aussi
? Non. Impossible. Je me fais des idées. Il est juste sous le choc de ce que je lui ai révélé
Atrynx est revenu vers moi et ma parlé.
Il ne doit pas savoir
je suis karavanière et il est kamiste, rien ne pourrait combler ce fossé qui nous sépare
Oh par Jena, il faut que jarrête de trembler, il va finir par sen apercevoir !
Sa voix résonne encore à mes oreilles, empreinte de douceur et de chaleur.
"Lao-Shan
Il est mon meilleur ami mais il ne comprendra jamais que lamour ne se partage pas avec plusieurs homines à la fois
Tu as bien fait de le quitter. Tu mérites dêtre heureuse et ce ne serait pas le cas avec lui."
Jai essayé de détourner mon regard de lui, mais en vain. Mon espoir de bonheur se tenait là, devant moi, sous lapparence de ce Tryker aux yeux bandés et à léternel bandana. Je remarquai soudain quil avait caché son médaillon kamiste et jen fus stupéfaite. Pourquoi avait-il fait cela ? Mes doigts se posèrent alors sur le symbole de mon lien avec ma déesse et je le cachai moi aussi sous mon petit vêtement zoraï. Comme pour combler ce fossé religieux qui nous séparait. Comme pour lui montrer que jétais une homine et non pas seulement une croyante. Ceci ma fait sourire. Comme si, par ce simple geste, je devenais un peu sa complice. Ces médaillons désormais cachés formaient comme un lien invisible entre nous
et cétait merveilleux.
Soudain, il sest effondré.
"Atrynx !!!"
Jai couru vers lui, incrédule, paniquée, perdant un instant tous mes réflexes de soigneuse.
"Atrynx, que tarrive-t-il ?"
Il était là, devant moi, quasi inconscient
Ses lèvres essayaient de remuer mais ce fut par télépathie quil réussit à me parler.
"Appelle Amatsu
Vite ! « Elle » mattaque
"
Jamais je nai aussi vite écrit un mot, jamais je nai aussi vite intercepté un izam messager.
* Vole, Izam, vole de toutes tes forces
Trouve vite Amatsu, il le faut
Je ne supporterais pas de perdre Atrynx
*
Et tandis que tous mes espoirs se portaient vers Amatsu, mes gestes de soigneuse reprirent le dessus et je moccupai dAtrynx du mieux que je le pouvais.
Il était couvert de sueur et était toujours inconscient. Mes remèdes ne pouvaient rien pour lui, et jenrageais dimpuissance en me contentant de lui rafraîchir le front avec un linge trempé dans leau du Lac
*********************************************************
"Vous êtes contente de vous ? En une seule rencontre avec lui, vous avez réussi à briser un an dentraînement !"
Les mots d'Amatsu étaient tombés, secs et blessants. Mais pour la première fois de ma vie, je ne répondis rien à une attaque verbale contre moi.
"Que lui arrive-t-il ? Pouvez-vous le sauver ?
- Ce quil lui arrive ? Jignore ce que vous avez fait mais cela a permis à la Goo de briser les défenses dAtrynx
Félicitations !"
Je me suis senti pâlir, comme si ma sève quittait mes veines à jamais.
"Que puis-je faire ?
- Dites-lui une bonne fois pour toute que vous laimez, cest tout ce que vous pouvez faire.
- Mais
???
- Inutile de me mentir, cest moi qui ai lu votre lettre à Atrynx. Vous le perturbez et il en délaisse son entraînement. Ses pensées sont troublées et il ne parvient plus à se concentrer pour se battre contre la maladie. Arrêtez donc de tourner en rond, dites-lui que vous laimez !
- Mais je ne
- Reculez maintenant. Vous me gênez."
Moi qui suis si fière dordinaire ai reculé sans mot dire, lâchant avec peine la main du Tryker inconscient.
Amatsu ouvrit alors un Lien télépathique avec Atrynx, communiquant directement avec lesprit de lhomin gisant au sol.
Cela dura longtemps
Que se passait-il durant ce Lien ? Je lignore
Atrynx mavait promis de menseigner cet art, mais en aurait-il seulement loccasion ? Se relèverait-il de cette attaque de la Goo ?
Jaurais voulu méloigner et aller me rafraîchir dans leau apaisante du Lac mais mon corps refusait de bouger. Je sentais confusément que mon aveu concernant Lao-Shan avait précipité Atrynx à terre aussi sûrement que laurait fait un coup dépée.
De la sève commençait à sortir de sa bouche.
Je me souviens de la peur qui me saisit alors. Comme si on me précipitait dans un gouffre sans fond
Comme si je sentais la vie séchapper à jamais de cet homin que jaimais sans oser lavouer à quiconque, sauf à mon amie Vaness.
Alors je me suis de nouveau approchée, faisant fi de lordre dAmatsu, et jai repris sa main. Des mots sont sortis de mes lèvres, des mots que je gardais depuis si longtemps au fond de moi quils ne demandaient quà séchapper
"Lutte de toutes tes forces Atrynx ! Tu ne peux pas mourir maintenant ! Tu dois vivre ! Je veux que tu vives parce que
parce que je
je taime
"
Le silence retomba lourdement sur les Lacs. Mais ces derniers mots, cet aveu enfin libre de senvoler, sembla longtemps planer autour de moi, résonnant inlassablement à mes oreilles.
La sève cessa peu à peu de couler de la bouche dAtrynx. Bientôt, elle apparut aux commissures des lèvres dAmatsu. Le mystère du Lien restait total, mais je savais que cela signifiait que cétait en train de marcher. Atrynx lâcha brusquement ma main, et ce fut pour moi comme un déchirement. Cependant, je restai là, sans bouger, le cur rempli despoir.
Peu à peu, le visage dAtrynx se recolora tandis que celui dAmatsu se crispait. Enfin, à un moment béni de Jena, Atrynx ouvrit les yeux. Je crus mévanouir de bonheur. Jinterrogeais muettement Amatsu du regard.
"Il est sauvé."
Je remerciais conjointement Jena, Ma Duk et Amatsu pour ce miracle, ne me rendant même pas compte de lillogisme de ma prière.
Ce fut alors que nos regards se croisèrent. Lespace dun instant, plus rien nexista sur Atys hormis Atrynx et moi
Quelque chose de nouveau brillait dans son regard
Jétais comme hypnotisée
Jentendis alors sa voix dans mon esprit ; cette voix douce et merveilleuse
"Moi aussi
"
Incrédule, plus heureuse que jamais, je sentis apparaître sur mes lèvres le même sourire que celui quarborait cet homin devant moi, celui que jaimais
et qui maimait également
Amatsu nous sortit de notre délicieuse torpeur.
"Titana, tu devrais lui redire ce que tu lui as dit quand il était dans le coma
- Je sais
Jai entendu
"
Un sourire de connivence anima Atrynx alors quil me regardait.
"Alors, réponds-lui ! Dis-lui ce que ton esprit ma avoué durant le Lien !
- Je lui ai dit aussi
"
A cet instant, jaurais aimé être seule avec lui sur la plage
Mais Amatsu était là
cet homin que je nappréciais guère et qui ne faisait que me tolérer lui aussi.
"Très bien. Titana, il doit se reposer à présent. Rentre chez toi, je moccupe de lui.
- Je sais
Repose-toi bien Atrynx
"
Tandis que les deux Trykers séloignaient côte à côte, lun deux se retourna un instant et me regarda longuement, tandis quune voix familière retentissait de nouveau dans ma tête
*Rejoins-moi ce soir, sous ma tente à Zora
*
* Je viendrai
*
*********************************************************
Heureuse.
Aucun autre mot ne me vient à lesprit tandis que ma plume court sur ce parchemin. Le bonheur fait partie de moi, nourrissant mes veines, emplissant mon cur, gonflant mes poumons à les faire éclater.
Cela fait plusieurs semaines quAtrynx et moi nous aimons en secret. Nous nous efforçons de rester discrets, mais comment cacher à tous cette lueur qui brille dans nos yeux lorsque nous nous regardons ?
Au début, nous parvenions à nous quitter à quelques centaines de mètres de lentrée de Fairhaven
Mais plus le temps passe et moins nous parvenons à nous lâcher la main. Hier, nous avons été comme pris de folie, et nous sommes offerts le luxe de rester main dans la main jusquà la porte de la ville
Prudence !
Ma raison me hurle ce mot, mais elle est submergée par linconscience de mes sentiments. Je ne contrôle plus mes gestes, la menace planant sur nous me semble quasi irréelle. Comme si la magie de notre histoire suffisait à nous protéger contre le fanatisme religieux et lincompréhension
Près de létable, jai aperçu deux Matis qui me connaissent. Je men moque. Jamais Jena ne leur permettrait de briser mon bonheur. Sa Lumière va attirer leur regard ailleurs, jen suis certaine. Je me revois sourire par-dessus lépaule dAtrynx, me sentant invincible, prête à défier tous ceux qui voudraient nous séparer, tandis que nous restions un moment enlacés, défiant ouvertement les esprits obtus, profitant juste du bonheur dêtre ensemble ...
Alors que jécris ces mots, une conversation entre lui et moi me revient. Nous étions alors près du téléporteur kami dYrkanis. Le temps était splendide et nous étions blottis lun contre lautre, non loin de la falaise.
Je lui avais avoué souffrir de devoir vivre notre amour en secret et vouloir le clamer haut et fort. Jétais prête à affronter tous ceux qui ne comprendraient pas
prête à tout quitter pour le suivre
Comment a-t-il fait ? Quelques simples mots de sa part ont suffi à faire taire cette colère qui grondait en moi ; à refouler cette impatience qui aurait pu détruire notre bonheur si fragile.
Jai compris alors que même la puissance de notre amour ne pourrait rien contre la folie religieuse ; que tout quitter pour le suivre ne nous apporterait que du malheur ; que notre seul espoir résidait dans notre discrétion
Oh Jena, pourquoi tant de fanatisme en ce monde ? Pourquoi deux homins tels que nous nont-ils pas le droit de saimer ouvertement ? En quoi le fait que lun adore un dieu et lautre une déesse est-il une barrière infranchissable ? Mon cur est empli de questions
Réponds-moi, ma Déesse adorée, jai besoin de comprendre !
Je ne te demande pas grand-chose
Juste davoir le droit de vivre auprès dAtrynx sans avoir à me cacher ! Pouvoir parler de lui à ceux que jaime ; pouvoir crier mon amour pour lui par-dessus les toits sans voir les regards se détourner, emplis dincompréhension et deffroi
Jena, je ne comprends plus
Certains, sils étaient- au courant, sempresseraient de dire quAtrynx ma détournée de ta Lumière divine, mais ils ont tort ! Je tadore peut-être plus quavant
Mais mon esprit se réveille et là où avant, il se contentait de tobéir aveuglément, à présent il est torturé par mille questions
Je vais poser la plume à présent. Il est temps que je me prépare.
Jai rendez-vous avec mon Atrynx adoré au bar de Fairhaven. Après tout, deux amis ont bien le droit de discuter autour dune table ! Personne ne pourra rien soupçonner
Atrynx, attends-moi, jarrive ! Je taime
Journal d'une Matis
Moderator: Chroniques d'Atys
Re: Journal d'une Matis
** hors rp, magnifique texte, vraiment très beau. **
http://zorai.forumzen.com/index.forum
"Ce quon ne désire pas pour soi, ne pas le faire à autrui."
Confucius
Re: Journal d'une Matis
/hrp rien a ajouterjapon wrote:** hors rp, magnifique texte, vraiment très beau. **
"Mais pourquoi est t-il si méchant ?"
Lao-Shan Lung.
Lao-Shan Lung.
Re: Journal d'une Matis
*Refoule une petite larme*
/hrp vraiment magnifique
/hrp vraiment magnifique
Re: Journal d'une Matis
Sortant de l'assenseur sentant la brise fraiche j'étais heureuse aprés ces retrouvailles avec celui que j'aimait. Admirant le soleil levant sur les lac, paisible et confiante en un avenir heureux.
Sachant Lao partit pour son travail et L...... absente pour un temps. Je decidais de passer chez Lao pour y recuperer deux trois affaires que j'y avait laissé.
En entrant je sentis sa presence dans l'air et cela ne me plus pas vraiment. Je recuperais prestement mes affaire quand soudain furetant de ci de là pour voir si je n'avais pas oublié quelque chose. Je vis le journal rangé. Je le considerais de haut. Puis l'ouvris.
Lisant posément pages apres pages, lignes aprés lignes. Sentant en moi monter des sentiments que je n'avais plus éprouvé depuis des années. Puis me relevant soudain les yeux embrumés de larmes. Je plantais une de mes Dagues au milieu de ces mot. Tentant vainement de terrasser la fatalité qui s'abattait encore sur moi ! Des larmes coulèrent sur mes joues. Je jetais au sol le passe que m'avait donné Lao. Laissant tout en l'état je fuis ce lieu.
Sachant Lao partit pour son travail et L...... absente pour un temps. Je decidais de passer chez Lao pour y recuperer deux trois affaires que j'y avait laissé.
En entrant je sentis sa presence dans l'air et cela ne me plus pas vraiment. Je recuperais prestement mes affaire quand soudain furetant de ci de là pour voir si je n'avais pas oublié quelque chose. Je vis le journal rangé. Je le considerais de haut. Puis l'ouvris.
Lisant posément pages apres pages, lignes aprés lignes. Sentant en moi monter des sentiments que je n'avais plus éprouvé depuis des années. Puis me relevant soudain les yeux embrumés de larmes. Je plantais une de mes Dagues au milieu de ces mot. Tentant vainement de terrasser la fatalité qui s'abattait encore sur moi ! Des larmes coulèrent sur mes joues. Je jetais au sol le passe que m'avait donné Lao. Laissant tout en l'état je fuis ce lieu.
Amano PDG
Atys Fleurs Inc
La Face des Vents
Immeuble de Loria Ascenseur G
/tell Amano
Atys Fleurs Inc
La Face des Vents
Immeuble de Loria Ascenseur G
/tell Amano
Re: Journal d'une Matis
Le froid … L’horreur … Le néant …
Je suis là, assise sur la berge de ce petit îlot au nord de Fair Haven. Seule. Seule avec mes sombres souvenirs …
Oh Jena ! Tandis que j’écris ces mots, j’ai la douloureuse sensation de revivre encore et encore la scène qui s’est déroulée ici, tel un cauchemar revenant sans cesse. Chaque parcelle de mon être en tremble et mon cœur achève de se briser à jamais …
Quand cela a-t-il eu lieu ? Hier ? La semaine dernière ? Le mois dernier ? Je n’ai plus la notion du temps … Mon horloge s’est arrêtée en même temps que la vie de mon aimé. A quoi bon vivre ? Il était ma lumière et il n’est plus … Je lui avais donné mon cœur et il l’a emporté avec lui … Mon âme était liée à la sienne et à présent elle n’en peut plus de ce silence, de cette solitude éternelle …
Je suis seule sur l’îlot ; personne d’autre à part un adepte kami se promène ici. Je regarde l’eau du Lac et mon cœur se serre douloureusement tandis que je revis une fois de plus cette scène insoutenable.
Je le revois comme s’il était présent devant moi … Mon regard ne parvient pas à se détacher de ce corps sans vie que soutient Amatsu, le corps de bon bien-aimé …
Oh, Jena, pourquoi as-tu permis cela ??? Comment un tel drame a-t-il pu bien arriver ? Je suis là, à quelques mètres à peine de lui, des larmes incrédules et impuissantes inondant mon visage. Je regarde le corps d’Atrynx, refusant de croire à cette réalité.
Oh Ma Duk ! Je t’en supplie, réveille-le ! Toi qui es aussi puissant que ma déesse, ramène-le à la vie encore une fois ! Oui, moi, l’adoratrice de Jena, je te prie toi, Ma Duk, toi qui es sensé être mon ennemi, toi en qui Atrynx croyait si fort. Je te prie pour lui, pour que tu nous laisses une chance de vivre heureux tous les deux. Comment pourrais-je vivre sans lui ? Nous n’avons vécu ensemble qu’une seule année atysienne ! Il nous en reste tellement d’autres à vivre côte à côte!
Amatsu, non !!! Par pitié ! Ne le rends pas encore aux eaux du Lacs … Je veux le voir encore …
Rester digne … Rester droite … Montrer à mon Atrynx adoré qu’il n’est pas mort en vain. Ne pas regarder ce corps ensanglanté dans lequel il s’est lui-même planté l’épée ...
Voilà. Je l’ai fait.
J’ai réussi. J’ai déposé sur lui sa fleur préférée et je lui ai parlé une dernière fois. J’ignore comment j’ai fait pour ne pas m’écrouler à même la sciure, suppliant Amatsu de me tuer et de m’immerger avec mon aimé. Mais je dois tenir … Atrynx voulait que je vive ! Son geste était aussi un geste d’amour …
Tandis que j’écris ces mots, un flot d’images me revient en mémoire.
Amatsu perçant de l'épée le coeur de son ami Atrynx, permettant ainsi à son dieu de le ramener à la vie exempt de la Goo qui le rongeait peu à peu et qu’il maîtrisait avec tant de mal. Atrynx guéri à jamais de cette terrible maladie, notre avenir plus bleu que jamais sans cette menace au-dessus de sa tête …
Atrynx et moi, serrés l’un contre l’autre, ne pensant à rien d’autre qu’au bonheur d’être ensemble …
Liiana essayant de me persuader qu’Atrynx était de nouveau contaminé par la Goo, mais à un niveau tel que sa raison commençait à sombrer et qu’il avait tenté de la tuer … Comment croire cela ? Liiana était devenue folle, sa captivité chez les Alkianes avait eu raison de son esprit, c’était certain ! Il me suffisait de regarder Atrynx dans les yeux pour savoir qu’elle avait tort … Et le fait qu’Amatsu soutenait le même mensonge n’y changeait rien.
Pourquoi voulaient-ils tous me séparer de lui ? Nous en voulaient-ils à ce point d’avoir des religions opposées ?
Amatsu, non !!! Range ton épée, par pitié ! Je me débats en vain, agitant les bras désespérément pour ne pas sombrer dans le gouffre de l’horreur. Atrynx ! Ils sont persuadés que la Goo te gouverne et veulent te tuer ! Fuis mon amour, fuis ! Je vais faire un rempart de mon corps pour te protéger … Regarde Amatsu, regarde cette épée qui te fait face ! Oui, moi la guérisseuse, je suis capable de manier l’épée s’il le faut ! Tu dis que c’est perdu d’avance … Crois-tu que je l’ignore ? Crois-tu réellement que je songe sérieusement à te faire mordre la sciure ? Mais le temps durant lequel je tiendrai debout permettra à Atrynx de s’échapper et de se téléporter ailleurs … et c’est tout ce qui compte.
Fuis mon amour ! Les puissances karavanières me ramèneront à la vie …
Tu vois, je te l’avais dit. Me voici de nouveau debout, tremblante mais résolue, devant l’autel de ma divinité. J’entends ta voix dans ma tête …
« Zora … Rejoins-moi à Zora … »
J’ai brisé la perle de sève avec l’énergie du désespoir. Un sombre pressentiment s’éveillait en moi, mais je refusais d’y croire.
Zora.
J’ai couru vers le lieu où nous aimions tant nous promener, regardant furtivement aux alentours si Liiana ou Amatsu ne nous avaient pas repérés.
Oh, comme je me sens bien dans tes bras !!! Mais pourquoi ce regard si triste ?
Désespoir ! Non !!! Ce ne peut être vrai !
Tu m’affirmes être effectivement de nouveau infecté par la Goo, avec une telle force que ta raison sombre et que bientôt, tu nous feras du mal sans le vouloir … Tu me regardes avec ces yeux tellement emplis d’amour, et en même temps, tu me dis d’une voix posée que tu vas partir très loin et que tu ne reviendras jamais, car tu refuses de prendre le risque de me faire du mal malgré toi …
Oh Atrynx !!! Contamine-moi et laisse-moi partir avec toi ! Je ne peux pas vivre sans toi …
Rester digne. Ne pas lui montrer à quel point je souffre. Lui laisser de moi l’image d’une homine aimante et souriante, c’est tout ce que je peux lui offrir et je le ferai.
Cette perle qu’il brise déjà … Non ! Encore un baiser, juste un dernier … Entends-tu mon cœur qui crie ? Je t’aime, Atrynx !!!
Ça y est, il a disparu à jamais …
Comme il est pénible d’écrire ces phrases ! Pourtant, je dois le faire … Ce carnet que j’écris permettra à Atrynx de rester un peu vivant à travers le temps, ce sera un peu l’empreinte de notre amour.
***************************************************************************
Je m’en souviens comme si c’était hier …
J’étais revenue au hall de ma guilde, complètement perdue après la disparition d’Atrynx. Un Marcheur m’attendait. Il avait appris, Jena seule sait comment, mon histoire avec Atrynx. Ma guilde est karavanière, très croyante en notre déesse. Et Darsh n’a pas du tout apprécié ma scandaleuse liaison avec un kamiste. J’ai cru qu’il allait me traîner sur le champ au temple, me forçant à expier ce qui pour lui était une faute impardonnable.
En temps normal, j’aurais bondi, griffé, mordu, mon regard aurait foudroyé cet homin qui était mon ami mais qui ne comprenait rien à mon amour pour Atrynx. Seulement, j’étais éteinte … Je venais de recevoir un message terrible d’Amatsu. Ce dernier avait fini par retrouver Atrynx et avait assisté à sa mort. Mon aimé s’était donné la mort avec son épée, se libérant ainsi de souffrances insupportables, mettant dignement fin à sa vie. Ses blessures étaient telles que les puissances ne purent le ranimer. J’étais attendue sur la petite île au nord de Fair Haven où aurait lieu son immersion dans la plus stricte intimité …
Par Jena, je suis encore sur cet îlot ! Où que j’aille, mes pas m’y ramènent … Je dois vivre pour Atrynx … Mettre fin à mes jours serait du pur égoïsme … Pourtant, ce serait tellement plus simple …
Atrynx, tu me manques tant ! Je t’aime à jamais …
Je suis là, assise sur la berge de ce petit îlot au nord de Fair Haven. Seule. Seule avec mes sombres souvenirs …
Oh Jena ! Tandis que j’écris ces mots, j’ai la douloureuse sensation de revivre encore et encore la scène qui s’est déroulée ici, tel un cauchemar revenant sans cesse. Chaque parcelle de mon être en tremble et mon cœur achève de se briser à jamais …
Quand cela a-t-il eu lieu ? Hier ? La semaine dernière ? Le mois dernier ? Je n’ai plus la notion du temps … Mon horloge s’est arrêtée en même temps que la vie de mon aimé. A quoi bon vivre ? Il était ma lumière et il n’est plus … Je lui avais donné mon cœur et il l’a emporté avec lui … Mon âme était liée à la sienne et à présent elle n’en peut plus de ce silence, de cette solitude éternelle …
Je suis seule sur l’îlot ; personne d’autre à part un adepte kami se promène ici. Je regarde l’eau du Lac et mon cœur se serre douloureusement tandis que je revis une fois de plus cette scène insoutenable.
Je le revois comme s’il était présent devant moi … Mon regard ne parvient pas à se détacher de ce corps sans vie que soutient Amatsu, le corps de bon bien-aimé …
Oh, Jena, pourquoi as-tu permis cela ??? Comment un tel drame a-t-il pu bien arriver ? Je suis là, à quelques mètres à peine de lui, des larmes incrédules et impuissantes inondant mon visage. Je regarde le corps d’Atrynx, refusant de croire à cette réalité.
Oh Ma Duk ! Je t’en supplie, réveille-le ! Toi qui es aussi puissant que ma déesse, ramène-le à la vie encore une fois ! Oui, moi, l’adoratrice de Jena, je te prie toi, Ma Duk, toi qui es sensé être mon ennemi, toi en qui Atrynx croyait si fort. Je te prie pour lui, pour que tu nous laisses une chance de vivre heureux tous les deux. Comment pourrais-je vivre sans lui ? Nous n’avons vécu ensemble qu’une seule année atysienne ! Il nous en reste tellement d’autres à vivre côte à côte!
Amatsu, non !!! Par pitié ! Ne le rends pas encore aux eaux du Lacs … Je veux le voir encore …
Rester digne … Rester droite … Montrer à mon Atrynx adoré qu’il n’est pas mort en vain. Ne pas regarder ce corps ensanglanté dans lequel il s’est lui-même planté l’épée ...
Voilà. Je l’ai fait.
J’ai réussi. J’ai déposé sur lui sa fleur préférée et je lui ai parlé une dernière fois. J’ignore comment j’ai fait pour ne pas m’écrouler à même la sciure, suppliant Amatsu de me tuer et de m’immerger avec mon aimé. Mais je dois tenir … Atrynx voulait que je vive ! Son geste était aussi un geste d’amour …
Tandis que j’écris ces mots, un flot d’images me revient en mémoire.
Amatsu perçant de l'épée le coeur de son ami Atrynx, permettant ainsi à son dieu de le ramener à la vie exempt de la Goo qui le rongeait peu à peu et qu’il maîtrisait avec tant de mal. Atrynx guéri à jamais de cette terrible maladie, notre avenir plus bleu que jamais sans cette menace au-dessus de sa tête …
Atrynx et moi, serrés l’un contre l’autre, ne pensant à rien d’autre qu’au bonheur d’être ensemble …
Liiana essayant de me persuader qu’Atrynx était de nouveau contaminé par la Goo, mais à un niveau tel que sa raison commençait à sombrer et qu’il avait tenté de la tuer … Comment croire cela ? Liiana était devenue folle, sa captivité chez les Alkianes avait eu raison de son esprit, c’était certain ! Il me suffisait de regarder Atrynx dans les yeux pour savoir qu’elle avait tort … Et le fait qu’Amatsu soutenait le même mensonge n’y changeait rien.
Pourquoi voulaient-ils tous me séparer de lui ? Nous en voulaient-ils à ce point d’avoir des religions opposées ?
Amatsu, non !!! Range ton épée, par pitié ! Je me débats en vain, agitant les bras désespérément pour ne pas sombrer dans le gouffre de l’horreur. Atrynx ! Ils sont persuadés que la Goo te gouverne et veulent te tuer ! Fuis mon amour, fuis ! Je vais faire un rempart de mon corps pour te protéger … Regarde Amatsu, regarde cette épée qui te fait face ! Oui, moi la guérisseuse, je suis capable de manier l’épée s’il le faut ! Tu dis que c’est perdu d’avance … Crois-tu que je l’ignore ? Crois-tu réellement que je songe sérieusement à te faire mordre la sciure ? Mais le temps durant lequel je tiendrai debout permettra à Atrynx de s’échapper et de se téléporter ailleurs … et c’est tout ce qui compte.
Fuis mon amour ! Les puissances karavanières me ramèneront à la vie …
Tu vois, je te l’avais dit. Me voici de nouveau debout, tremblante mais résolue, devant l’autel de ma divinité. J’entends ta voix dans ma tête …
« Zora … Rejoins-moi à Zora … »
J’ai brisé la perle de sève avec l’énergie du désespoir. Un sombre pressentiment s’éveillait en moi, mais je refusais d’y croire.
Zora.
J’ai couru vers le lieu où nous aimions tant nous promener, regardant furtivement aux alentours si Liiana ou Amatsu ne nous avaient pas repérés.
Oh, comme je me sens bien dans tes bras !!! Mais pourquoi ce regard si triste ?
Désespoir ! Non !!! Ce ne peut être vrai !
Tu m’affirmes être effectivement de nouveau infecté par la Goo, avec une telle force que ta raison sombre et que bientôt, tu nous feras du mal sans le vouloir … Tu me regardes avec ces yeux tellement emplis d’amour, et en même temps, tu me dis d’une voix posée que tu vas partir très loin et que tu ne reviendras jamais, car tu refuses de prendre le risque de me faire du mal malgré toi …
Oh Atrynx !!! Contamine-moi et laisse-moi partir avec toi ! Je ne peux pas vivre sans toi …
Rester digne. Ne pas lui montrer à quel point je souffre. Lui laisser de moi l’image d’une homine aimante et souriante, c’est tout ce que je peux lui offrir et je le ferai.
Cette perle qu’il brise déjà … Non ! Encore un baiser, juste un dernier … Entends-tu mon cœur qui crie ? Je t’aime, Atrynx !!!
Ça y est, il a disparu à jamais …
Comme il est pénible d’écrire ces phrases ! Pourtant, je dois le faire … Ce carnet que j’écris permettra à Atrynx de rester un peu vivant à travers le temps, ce sera un peu l’empreinte de notre amour.
***************************************************************************
Je m’en souviens comme si c’était hier …
J’étais revenue au hall de ma guilde, complètement perdue après la disparition d’Atrynx. Un Marcheur m’attendait. Il avait appris, Jena seule sait comment, mon histoire avec Atrynx. Ma guilde est karavanière, très croyante en notre déesse. Et Darsh n’a pas du tout apprécié ma scandaleuse liaison avec un kamiste. J’ai cru qu’il allait me traîner sur le champ au temple, me forçant à expier ce qui pour lui était une faute impardonnable.
En temps normal, j’aurais bondi, griffé, mordu, mon regard aurait foudroyé cet homin qui était mon ami mais qui ne comprenait rien à mon amour pour Atrynx. Seulement, j’étais éteinte … Je venais de recevoir un message terrible d’Amatsu. Ce dernier avait fini par retrouver Atrynx et avait assisté à sa mort. Mon aimé s’était donné la mort avec son épée, se libérant ainsi de souffrances insupportables, mettant dignement fin à sa vie. Ses blessures étaient telles que les puissances ne purent le ranimer. J’étais attendue sur la petite île au nord de Fair Haven où aurait lieu son immersion dans la plus stricte intimité …
Par Jena, je suis encore sur cet îlot ! Où que j’aille, mes pas m’y ramènent … Je dois vivre pour Atrynx … Mettre fin à mes jours serait du pur égoïsme … Pourtant, ce serait tellement plus simple …
Atrynx, tu me manques tant ! Je t’aime à jamais …
Last edited by tnaara on Thu Aug 17, 2006 8:39 pm, edited 1 time in total.
Nymphéa Lae Lia, Taliar
Chef de la Garde des Dragons Noirs, guilde multiraciale de citoyenneté tryker et neutre de religion
Guilde membre des Maisons de la Libre Ecorce