Le bar de fairheaven, un soir, une bouteille pour toute compagnie...

[shantag]

"Est-ce notre destiné d'homin que de nous voir ainsi déchiré?

Deux factions étrangères dans leur patrimoine héréditaire à nos quatre peuples, s'il fallait nommé que ceux "civilisés", érigeaient nos dogmes, inculquaient nos valeurs, nous dressaient contre "l'autre camps".

Tout ça pour quoi?

La seule menace qui a fait trembler les peuples venait des profondeurs de l'Ecorce et elle se nomme : "Kitins".

En dehors de subterfuges "divins", je ne vois nul autre ennemi.

Les kamis ont sauvé des homins... la karavan en a fait autant... le but ultime des uns étant antagoniste à celui des autres, nous avons pourtant été asservis à l'une ou l'autre vision. Nous considérant piétaille dans un mépris policé de notre condition, nous régulons au mieux de notre quotidien les préceptes anti-hominiques que leur foi en eux nous imposent.

La peine m'étreint quand je sais que mes frères Matis rendent l'âme, leur graine de vie broyée sous la botte d'un Fyros victorieux d'eux et porteur d'une haine instillée par des préceptes de droit divin qui ne sont pas de lui. La même peine alourdit mon coeur quand l'inverse se produit.
Je me dis qu'il s'agit d'êtres de sève animés par le désir de protéger ce qui leur est cher, et orientés sur des idéaux qui ne sont pas les leurs de prime abord.

Ces entités ont les bons côtés qu'on leur connaît : de ceux qu'elles veulent bien nous faire part... des plus politiquement corrects, des plus faciles à appréhender. Et même si la résultante de leur litanie n'est pas aussi simpliste que ce que j'en dépeins, l'aboutissement de leur credo vise à l'extermination de peuples aux inimités séculaires mais étrangères à la motivation propre des êtres supérieurs que ceux-ci servent. Je ne compte plus les fois où les batailles se sont ensuivies dans les primes pour défendre les intérêts de l'une ou l'autre des factions.

Les présents somptueux et cruciaux des transports inter et intracontinentaux et surtout le gage de la pérénité de notre vie éternelle, nous musellent et nous empêchent de connaître notre propre essor, notre propre histoire. Il y a la légende des cubes d'ambres... et là encore deux versions : une en écriture Kamique et l'autre Karavanique. Les deux factions s'arrogeant la tutelle de l'écriture de notre histoire passée et à venir.

La confédération aurait pu être une étape connue des peuples homins... Mais son idée n'est que chimère avec de tels carcans religieux qui nous assermentent à un seul et unique sermon... et pourtant kami comme Jena, parlent d'amour...

Un roi dirige les matis. Il parait... Je fus heureux d'entendre jusqu'au pays des lacs l'exhortation faite par Shaarm, Attitrée du Conseil des Maisons Matisses, forçant à porter un regard pour considérer "la piétaille" : de celle qui se soude et oublie ses différences quand la menace est là et bien réelle. En effet, qui s'en est allé au-devant du danger ? Ce sont les réfugiés qui ont enrayé l'invasion kitin, combattu les égorgeurs, attaqués les repères kitins, guerroyés dans les primes contre d'autres homins... Il est justice toutefois de reconnaître qu'un grand prince kitin fut abattu aux abords d'Yrkanis par les gardes royaux... ils auraient été grandement appréciés sur le champs de bataille, au plus fort des combats loin de la sécurité d'une ville peuplée.

Le roi... la charge d'un titre incombant à un nanti préservé lui et sa famille des heurts du combat... combien d'Homins peuvent parler de leurs parents encore en vie? Combien se tairont en invoquant l'image d'un frère ou d'une soeur, de son fils ou... de ses filles et d'une épouse disparue...?

La rage face à l'impuissance et le désir d'exister, sont les mots de Shaarm au-delà du bon aloi foulé aux pieds, de la bienséance bafouée que l'on s'est complait à exciser de la volonté première qui était sienne dans son pamphlet. Un esprit unitaire émerge parmi ceux des vaillants défenseurs des matis, mais aussi par extension, défenseurs de l'hominité dans son entier, qui revendique son intégrité et son attachement au peuple matis. Bien mieux que le roi ne l'a prouvé à son "enfant-peuple" jusqu'à présent.

Kami relayé d'un empereur ou Karavan relayé d'un roi... je sais juste que : Fyros, Zoraïs, Trykers et Matis se sont entretués au nom des "vertus" des deux camps, des "mystiques" et des "célestes" pour le bien commun" ... Ironisa en point final l'homin qui avait alors fait claquer sur la table le cul de son verre après l'avoir vidé d'un trait de son alcool aux ferments de Stinga.


La bouteille était entamée de moitié, pourtant l'étranger finit ainsi sa tirade et s'en fut.
Le bar de Fairheaven voyait "le monde", chaque jour, et surtout chaque nuit, fait et défait par tous les aventuriers, soldats, et pèlerins de passage.
Un monologue qui s'en était allée rejoindre ses prédécesseurs, emporté comme eux par les brises marines au delà de l'enceinte protectrice de la capitale Tryker, s'évanouissant alors de lui-même dans le crépuscule d'une lune rougeoyante...